Dans un document intitulé "Risque de méningiome et utilisation de macroprogestatifs", 4 sociétés savantes (CNGOF – SFE – SFG – FNCGM) indiquent dans quelles conditions peut être prescrit ce type de traitement.
Pour quoi sont prescrits les macroprogestatifs ?
"Les macroprogestatifs sont habituellement préconisés dans le traitement des pathologies endométriales ou mammaires bénignes. Certains d'entre eux ont un fort pouvoir antigonadotrope et sont donc aussi utilisables en contraception", résume la Société Française d’endocrinologie sur son site internet. Concrètement, les macroprogestatifs peuvent par exemple être prescrits pour l’acné, l’insuffisance lutéale, l’adénomyose, les fibromes, l’endométriose ou encore l’hirsutisme.
Assez rares*, les méningiomes sont des tumeurs cérébrales bénignes qui se développent à partir des méninges (tuniques enveloppant le cerveau et la moelle épinière) et qui augmentent avec l’âge. Environ 2/3 des méningiomes sont potentiellement sensibles aux hormones dérivées de la progestérone (progestatifs), car ils expriment des récepteurs de cette même hormone.
Méningiome et ANDROCUR : des règles de prescription strictes
Il y a quelques temps, un progestatif appelé acétate de cyprotérone (ANDROCUR® et ses génériques) a fait l’objet d’une nouvelle évaluation spécifique par l’Agence Nationale de Sécurité du médicament (ANSM) sur la survenue de méningiomes opérés. Des recommandations et des règles de prescription strictes ont ensuite été diffusées.
"Avant l’initiation de ce traitement, un IRM cérébrale doit être réalisé pour s’assurer de l’absence de méningiome préexistant", indiquent dans un communiqué de presse commun les 4 sociétés savantes (CNGOF – SFE – SFG – FNCGM) citées en début d’article. "Cet examen est renouvelé au bout de 5 ans si le traitement par acétate de cyprotérone est maintenu pendant toute cette durée, puis tous les deux ans en cas d’utilisation au-delà de 5 ans", ajoutent-elles.
"Par ailleurs, un formulaire de consentement doit être signé par la patiente et par le médecin prescripteur. Sans ce formulaire, l’acétate de cyprotérone ne peut être délivré par le pharmacien", poursuivent-elles.
Méningiome et macroprogestatifs : "les risques relatifs sont variables selon les molécules"
En juin 2020, puis plus récemment dans deux nouvelles publications de 2023 et de 2024, l’étude épidémiologique GIS EPIPHARE ANSM-CNAM a évalué le risque de méningiomes opérés chez les femmes sous traitement de type macroprogestatif versus celui des femmes non traitées. Ces études ont mis en évidence une augmentation significative du risque de méningiome dans le groupe de femmes traitées par l’acétate de chlormadinone (LUTERAN® et ses génériques qui ne sont plus commercialisés actuellement en France), la promegestone (SURGESTONE®, qui n’est plus commercialisée en France) mais aussi la médrogestone (COLPRONE®), l’acétate de nomégestrol (LUTENYL® et ses génériques) et l’acétate de médroxyprogestérone en dépôt (DEPOPROVERA®). "Les risques relatifs sont variables selon les molécules. Pour tous ces macroprogestatifs comme pour l’acétate de cyprotérone, il existe une relation dose-effet : plus la dose totale prise augmente, plus le risque de diagnostic de méningiome augmente", expliquent les institutions.
"Il est important de réévaluer chaque année la balance bénéfice/risque"
"Enfin, il est important de rappeler qu’en cas de méningiome découvert chez des patientes utilisant des macroprogestatifs, l’arrêt de ces molécules induit dans l’immense majorité des cas une stabilisation voire une diminution significative du volume tumoral", soulignent-elle.
En conclusion, "une vigilance est nécessaire lors de l’utilisation au long cours de macroprogestatifs en raison du risque de méningiomes. Il est également important d’évaluer et de réévaluer chaque année la balance bénéfice/risque de ce type de traitement pour chaque patiente", écrivent les professionnels de santé à la fin de leur rapport.
Deux requêtes ont été déposées devant le tribunal administratif de Montreuil
Selon les informations du journal Le Monde, des femmes qui s’estiment victimes des macroprogestatifs poursuivent actuellement l’Etat en justice pour être indemnisées.
"Deux requêtes ont été déposées devant le tribunal administratif de Montreuil. L’Agence du médicament est mise en cause pour avoir tardé à informer correctement les patientes du risque de tumeurs du cerveau malgré les alertes", précise le journaliste Stéphane Mandard dans un article publié le 29 mars.
*L’incidence annuelle de ces tumeurs cérébrales est très faible : elle est de 8 à 10 cas/100 000 personnes/an.