Les doutes sur le dossier médical personnel (DMP) se confirment. Sa très longue mise en place aurait, pour le moment, coûté pas moins de 500 millions d’euros. Et ce pour seulement 418 011 DMP ouverts. C’est ce que révèle ce matin Le Parisien qui a eu accès à « un document interne du Conseil national de la qualité et de la coordination des soins, chargé d’arbitrer les financements destinés à l’amélioration de la médecine de ville ». En clair, le coût de l’ouverture d’un DMP reviendrait à environ 1200 euros !
1200 euros le dossier
Ces estimations financières révélées ce matin par Le Parisien ne font que confirmer les critiques de la Cour des Comptes. Dans un rapport de février 2013, les magistrats de la rue Cambon estimaient le coût de la mise en place du DMP à 210 millions d’euros « avec une marge importante d’approximation », prévenaient-ils. Le quart de ce montant a été affecté à des expérimentations vite abandonnées et, si l’on tient compte des dépenses liées aux projets de convergence avec le dossier pharmaceutique et avec les dispositifs hospitaliers, la facture globale serait de l’ordre d’un demi-milliard, estimait déjà la Cour des Comptes. Mais « l’absence de suivi par le ministère de l’ensemble de ces dépenses ne permet pas d’être plus précis ».
Lancé en 2005, le dossier médical personnel (DMP) est manifestement un échec cuisant. Non seulement, son coût est exorbitant mais nous sommes loin des ambitions de départ. En effet, l’objectif était à l’origine de créer 5 millions de DMP. Dix fois moins ont été ouverts. Et toujours d’après Le Parisien, « selon les estimations des professionnels de la santé, plus de la moitié (des 418 011 DMP ouverts) contiennent très peu d'informations et le reste est vide. »
Pas d'outil pour mesurer le retour sur investissement
Sur le papier, pourtant, c’était une belle idée. Créé par le médecin à la demande du patient, le DMP devait rassembler les éléments nécessaires à la coordination des soins : analyses de laboratoire, antécédents, certificats, comptes rendus hospitaliers, traitements, etc. Mais, selon la Cour des comptes, des « défaillances de pilotage » ont eu raison de cette grande ambition. « Le report de l’évaluation médico-économique et le retard apporté par l’Etat à définir une stratégie en matière de système d’information de santé et une politique générale de sécurité » on été « autant de lacunes ». Les choix technologiques, eux aussi, étaient montrés du doigt. « Des normes d’interopérabilité des systèmes d’informations de santé, distinctes quoique proches, au lieu d’une seule, ont été édictées à quelques mois d’intervalle… ».
L’un des objectifs du DMP était d’éviter les analyses ou les examens redondants et de baliser le parcours de soins du malade. En limitant le guichet ouvert, l’assurance maladie espérait dégager des sources d’économie. Ce n’est pas le cas. Les auteurs du rapport estiment « qu’aucune méthodologie rigoureuse d’évaluation médico-économique des gains de performance pour le système de soins et des économies pour l’assurance maladie n’est à ce stade définie pour permettre de mesurer un retour sur investissement. »
Aujourd’hui, la lente et longue dérive du DMP ne fait plus aucun doute. Pour l’arrêter, la stratégie envisagée serait, selon les informations du Parisien, de confier la gestion de ce dossier épineux à la Caisse nationale d’assurance maladie, qui aurait les épaules plus larges que l’Agence nationale des systèmes d’information partagée de santé (Asip) pour piloter ce paquebot.