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Epidémie

Les mutations rapides du Mpox : vers un virus plus virulent ?

Par le Dr Jean-François Lemoine

Le virus du Mpox suscite aujourd'hui une inquiétude croissante en raison de ses mutations rapides. Alors que le monde tente de se remettre de la pandémie de COVID-19, le Mpox pourrait évoluer en une menace encore plus grave. 

iStock/peterschreiber.media
Le virus Mpox mute rapidement, créant de nouvelles souches potentiellement plus dangereuses.
Les différences avec la COVID-19 montrent que le Mpox nécessite des stratégies de gestion spécifiques.
Une réponse mondiale coordonnée est essentielle pour contenir l'évolution du virus et protéger la santé publique.

Le Mpox, également connu sous le nom de "variole du singe", est un virus qui, jusqu'à récemment, était largement limité à certaines régions d'Afrique centrale et occidentale. Cependant, depuis 2022, une flambée épidémique mondiale a révélé la capacité du virus à se propager bien au-delà de ses frontières traditionnelles. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a rapporté que le sous-clade IIb du virus a été responsable de cette épidémie mondiale. Mais ce n'est que la partie émergée de l'iceberg. Les experts redoutent que le virus ne mute plus rapidement que prévu, rendant sa gestion de plus en plus complexe.

Les mécanismes de mutation du Mpox

Comme tout virus, le Mpox possède la capacité d'évoluer au fil du temps par le biais de mutations génétiques. Ces mutations surviennent lorsque le virus se réplique à l'intérieur des cellules hôtes. En général, les mutations peuvent être inoffensives, mais certaines peuvent conférer au virus de nouvelles capacités, telles qu'une meilleure transmission entre humains ou une résistance accrue aux traitements ou aux vaccins.

Un point particulièrement préoccupant est la récente découverte d'une mutation dans le Mpox appelée APOBEC3. Cette mutation, selon les experts, pourrait potentiellement rendre le virus plus virulent, augmentant ainsi sa capacité à causer des maladies graves. En outre, elle pourrait réduire l'efficacité des vaccins actuels, compliquant encore plus la lutte contre cette maladie.

Le cas du clade I est particulièrement alarmant. Alors que le clade II a mis environ cinq ans pour évoluer et devenir plus transmissible chez les humains, le clade I a réalisé cette transformation en moins d’un an. Cela suggère que le Mpox pourrait muter à un rythme bien plus rapide que prévu, rendant difficile la prédiction de sa gravité et la mise en place de mesures efficaces pour le contrer.

Comparaison avec le virus de la COVID-19

Il est impossible d'aborder le sujet des mutations virales sans penser à la COVID-19, une autre maladie causée par un virus ayant rapidement évolué pour créer de nouvelles souches. Toutefois, bien que les deux virus soient capables de muter, il existe des différences significatives entre eux.

Tout d'abord, le virus du Mpox appartient à la famille des orthopoxvirus, tandis que le SARS-CoV-2, responsable de la COVID-19, est un coronavirus. Ces deux familles de virus ont des structures génétiques différentes, ce qui influence la manière dont elles mutent. Par exemple, les coronavirus comme le SARS-CoV-2 ont un mécanisme de correction des erreurs lorsqu'ils se répliquent, ce qui limite le nombre de mutations. En revanche, le Mpox, comme la plupart des orthopoxvirus, n'a pas ce mécanisme, ce qui pourrait expliquer pourquoi il semble muter plus rapidement dans certaines circonstances.

En outre, bien que la COVID-19 se transmet principalement par des gouttelettes respiratoires, le Mpox se propage généralement par contact direct avec les lésions cutanées d'une personne infectée, ou avec des matériaux contaminés. Cependant, les nouvelles souches du Mpox, comme celles du clade I et IIb, montrent des signes de transmission plus facile entre les humains, ce qui pourrait rapprocher ses modes de propagation de ceux du SARS-CoV-2.

Les implications pour la santé publique

La mutation rapide du Mpox et l'apparition potentielle de nouvelles souches plus virulentes posent un défi majeur pour la santé publique mondiale. Les vaccins actuellement utilisés pour prévenir le Mpox pourraient ne plus être efficaces contre ces nouvelles souches, ce qui nécessiterait le développement de nouveaux vaccins et traitements.

Le cas du Congo, où plus de 18 000 cas suspects de Mpox du clade I et clade Ib ont été signalés cette année, souligne la gravité de la situation. Avec 615 décès recensés, il est clair que le virus est capable de causer une maladie grave et mortelle, surtout dans les régions où l'accès aux soins est limité.

Une propagation difficile à contrôler

Les experts, comme le Dr Dimie Ogoina de l'hôpital universitaire du delta du Niger, soulignent l'importance de comprendre cette épidémie pour pouvoir y répondre efficacement. Sans une compréhension approfondie de la dynamique de transmission et des risques associés aux nouvelles mutations, il sera difficile de contrôler la propagation du virus et de minimiser son impact sur les populations vulnérables.

La rapide mutation du Mpox en fait une menace grandissante pour la santé mondiale. Les différences avec la COVID-19 montrent que chaque virus pose des défis uniques. Il est essentiel de rester vigilant et d'investir dans la recherche pour anticiper et répondre aux mutations du Mpox, afin d'éviter une crise sanitaire d'une ampleur similaire à celle du COVID-19.