L’infarctus du myocarde, aussi appelé crise cardiaque, est l’une des premières causes de mortalité dans le monde, y compris en France avec environ 100.000 cas par an. Double peine pour les patients ayant subi un infarctus, ils souffrent souvent également d’anémie, un manque de globules rouges dans le sang. Ce qui peut aggraver leur état car "plus le taux d'hémoglobine (la protéine qui transporte l'oxygène dans le sang) est bas, plus le risque de complications cardiovasculaires augmente".
C’est pourquoi, selon une nouvelle étude publiée dans la revue Circulation et présentée récemment au congrès de la Société européenne de cardiologie (ESC) à Londres, il serait "logique" de pouvoir soigner les patients présentant à la fois un infarctus du myocarde et une anémie en leur transfusant davantage de sang.
La question de la transfusion sanguine en cas d’infarctus du myocarde et d’anémie
"Le bénéfice de la transfusion dans ce contexte d’infarctus du myocarde est pourtant débattu", selon un communiqué des chercheurs français qui ont participé aux travaux. En théorie, la transfusion devrait augmenter l'apport d'oxygène au myocarde, mais de récentes données ont révélé que si "le sang transfusé a une forte capacité à capter l'oxygène, il a du mal à le libérer dans les tissus du corps, notamment dans le cœur endommagé par une crise cardiaque". Par ailleurs, pendant leur stockage avant d’être transfusés, les globules rouges perdent rapidement leur monoxyde d’azote, une substance au bon fonctionnement des vaisseaux sanguins, ce qui peut poser problème chez les patients au cœur fragile.
"Très peu d’essais randomisés ont analysé l’impact des différentes stratégies de transfusion" pour les patients ayant à la fois un infarctus et une anémie", précisent les scientifiques. Et les quelques essais qui ont été menés aux Etats-Unis et en Europe – sur 45, 110 ou encore 660 patients – ont donné lieu à des résultats soit "opposés", soit "qui n’avaient pas permis de conclure clairement".
Le risque cardiaque réduit de moitié avec la transfusion de sang
La nouvelle étude, réalisée au sein de 144 centres aux Etats-Unis, au Canada, au Brésil, en Australie ou encore en France (AP-HP), a comparé pendant six mois l’effet de deux stratégies de transfusion, restrictive (donner moins de sang) et libérale (donner plus de sang), chez plus de 3.500 patients atteints d’un infarctus du myocarde et d’une anémie. "C’est, de loin, le plus grand essai jamais conduit dans cette indication."
L’analyse a révélé qu’après un mois, il y a eu moins de décès ou de crises cardiaques dans le groupe qui avait reçu plus de transfusion sanguine (14,5 % de cas) comparé au groupe qui en avait reçu moins (16,9 %). Quant à la mortalité globale à six mois, elle était plus faible (20,5 % de cas) dans le groupe le plus transfusé que dans celui qui l’avait été le moins (21,7 %). "Plus intéressant encore, le risque de décès d’origine cardiaque serait réduit de 52 % dans le groupe libéral par rapport au groupe restrictif (6 % versus 9 %)."
Conclusion sans appel des scientifiques, "l’ensemble de ces résultats converge vers un bénéfice d’une stratégie de transfusion 'libérale' comparée à une stratégie 'restrictive' : transfuser plus de sang aux patients présentant un infarctus du myocarde et une anémie améliorerait leurs chances de survie".