Après une mastectomie (à savoir une chirurgie mammaire qui consiste à enlever le sein dans lequel se situe la tumeur dans son intégralité), les patientes présentant un cancer du sein ont besoin d’une radiothérapie de la paroi thoracique et des ganglions lymphatiques pour aider à prévenir la récidive. Historiquement, l’irradiation, dont le but est de détruire les cellules mammaires cancéreuses, se déroule généralement sur une période de cinq à six semaines. "Au cours des dix dernières années, nous avons essayé de réduire la durée des séances de radiothérapie pour toutes les patientes qui en ont besoin, car les doses quotidiennes plus élevées de radiation pourraient augmenter les effets secondaires. Mais celles ayant subi une mastectomie et prévoyant une reconstruction mammaire constituaient le seul groupe pour lequel nous ne disposions pas de données suffisantes pour justifier des traitements plus courts", a déclaré Matthew M. Poppe, professeur de radio-oncologie à l'université de l'Utah à Salt Lake City (États-Unis).
Cancer du sein : une radiothérapie de 25 fractions sur cinq semaines ou de 16 fractions sur environ trois semaines
C’est pourquoi le chercheur et son équipe ont décidé de mener une étude, publiée dans la revue International Journal of Radiation Oncology*Biology*Physics, afin de combler le manque de données probantes sur les schémas d'irradiation plus courts. Dans le cadre de leurs travaux, ils ont recruté, de 2018 à 2021, 898 personnes atteintes d'un cancer du sein invasif unilatéral dans 209 centres de cancérologie universitaires et communautaires aux États-Unis et au Canada. Les patients éligibles étaient ceux qui avaient des tumeurs plus grosses (pT3N0) ou plus petites et une invasion des ganglions lymphatiques régionaux (pT0-2 pN1-2).
Les participantes, ayant bénéficié d’une chimiothérapie avant ou après la mastectomie, prévoyaient une chirurgie reconstructive mammaire immédiate ou différée après une radiothérapie post-mastectomie. Elles ont été divisées en deux groupes pour recevoir soit une radiothérapie conventionnelle composée de 25 fractions administrées sur cinq semaines (50 Gray au total), soit une radiothérapie hypofractionnée composée de 16 fractions administrées sur environ trois semaines (42,56 Gy au total). Ensuite, les volontaires ont été suivies pendant environ cinq ans par les scientifiques afin d’évaluer toute complication de reconstruction, y compris les problèmes de cicatrisation des plaies, la réadmission à l'hôpital, la réopération non planifiée, l'échec de la reconstruction ou la construction capsulaire, qui implique un tissu cicatriciel affectant le nouveau sein.
Des complications chez 14 % des patientes ayant reçu une radiothérapie plus courte
Parmi les 650 patients qui ont terminé leur reconstruction au cours de la période d'étude, 59 % ont eu des implants seuls et 41 % ont eu une reconstruction autologue utilisant leurs propres tissus, avec ou sans implants. D’après les résultats, l'incidence des complications liées à la reconstruction mammaire à 24 mois était de 14 % avec la radiothérapie plus courte contre 11,7 % avec le traitement standard. "Cette différence a été considérée comme statistiquement non inférieure. (…) Nous nous attendions à un taux de complications de 25 à 35 % sur la base de précédentes recherches menées dans un seul établissement sur des patientes ayant subi une chirurgie reconstructive et une radiothérapie. C'était très enthousiasmant de constater un taux de complications qui était presque la moitié de ce que nous avions prévu", a indiqué Atif J. Khan, auteur principal des recherches.
Quel que soit le programme de traitement, les patientes ont connu moins de complications après une reconstruction autologue qu'après une reconstruction par implant seul (8,7 % autologue contre 15,5 % par implant seul). Selon les auteurs, des récidives locales ou régionales à trente-six mois sont survenues chez 1,5 % des adultes ayant reçu une radiothérapie plus courte et chez 2,3 % des patientes traitées de manière conventionnelle. Sans radiothérapie, la récidive typique après une mastectomie chez les patients présentant une maladie à haut risque est de 20 à 30 %. En ce qui concerne les effets secondaires, ils étaient tout aussi légers pour les deux groupes.
"La radiothérapie après une mastectomie sauve des vies. Les patients ne devraient pas avoir à choisir entre la radiothérapie ou l'absence de radiothérapie en fonction de leur désir de reconstruction, ou parce qu'ils ne peuvent pas perdre six semaines de leur vie", a conclu Matthew M. Poppe qui espère que cette étude encouragera davantage de centres de cancérologie à adopter un traitement de radiothérapie plus court pour toutes les patientes ayant subi une mastectomie.