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Journée nationale des aidants

"Je suis ta fille, mais je suis aussi infirmière"

Par Thierry Borsa

Le rôle d'aidant concernerait une personne sur cinq en France. Au-delà de la journée nationale qui leur a été consacrée le 6 octobre, les autorités ont lancé durant tout ce mois une campagne de sensibilisation sur leur quotidien. Accompagnants des patients atteints de maladies graves, des aidants racontent la réalité du soutien qu'ils leur apportent. Des témoignages recueillis avec le soutien institutionnel de Novartis. Aujourd'hui, celui de Stéphanie qui accompagne son père atteint d'un cancer de la prostate.

iStock/fizkes
Une campagne de sensibilisation sur le rôle des aidants se déroule durant ce mois d'octobre.
Stéphanie accompagne son père atteint d'un cancer de la prostate.
Elle insiste sur l'organisation de la vie de l'aidant pour pouvoir bien accompagner le patient.

Un moment que marque une vie : pour les membres de la famille d’un patient qui vient d’apprendre qu’il est atteint d’un cancer, il faut tout à la fois intégrer cette mauvaise nouvelle et composer avec les émotions qu’elle engendre. "Quand un médecin parle de prise en charge par un oncologue, on sait que la suite ne va pas être facile… Il y a tout qui s’écroule, vous vous dites ‘qu’est-ce qui va se passer, est-ce qu’il va mourir bientôt’, lorsqu’il s’agit d’un parent, vous avez toute votre vie qui défile", témoigne Stéphanie dont le papa septuagénaire souffre d’un cancer de la prostate.

"Passer de mon vocabulaire d'infirmière à celui d'un enfant face à un parent"

Pourtant, son métier d’infirmière l’a habituée à faire face à l’annonce d’une maladie. "J’ai déjà été confrontée à des patients atteints d’un cancer de la prostate, mais là, ce n‘est pas la même chose, il y a tout l’affect qui entre en jeu". D’être cette fois la fille du patient a changé son appréhension de la situation. "Il a fallu que je maîtrise le choix des mots, passer de mon vocabulaire d’infirmière à celui qu’emploie un enfant devant ses parents".

Et tous les spécialistes du cancer sont d’accord sur ce point : le maintien d’une bonne communication entre l’aidant et le patient est essentiel. Et tout compte, les mots choisis comme le ton de la voix ou le langage du corps. Pour Stéphanie, il s’est agi également de dépasser le réflexe de pudeur qui accompagne le fait d’être une fille lorsque la maladie concerne les organes masculins de son père : "Je me suis posé beaucoup de questions pour savoir comment je pouvais aborder les choses sans le mettre mal à l’aise, le pénis, la prostate, j’étais très gênée d’en parler avec mon papa mais en même temps il le fallait pour que je puisse assurer mon rôle d’aidante".

Un quotidien bouleversé

Finalement, à partir du moment où l’échange a pu se faire sur ces sujets –"Je l’ai pris entre quatre yeux en lui disant ’je suis ta fille mais je suis aussi infirmière’"- , Stéphanie s’est sentie libérée. "Cela a changé nos relations, je suis aujourd’hui beaucoup plus proche de mon père et de son côté son regard a changé vis-à-vis de moi, lui et ma mère se sont rendus compte qu’ils pouvaient compter sur moi dans n’importe quelle situation", constate-t-elle au point de voir dans cette épreuve quelque chose de très positif : "Bien sûr, c’est une maladie, mais cela a été magnifique pour nous trois !".

Pourtant, son rôle d‘aidante la place aussi parfois dans des situations qui ne sont pas faciles à vivre et qui ont bouleversé son quotidien. "Il faut être là dans les moments les plus compliqués, les rendez-vous avec les médecins, le retour au domicile après les interventions, les soins à faire… Il faut être capable de s’organiser pour tenir la place d’aidante et assumer ses missions professionnelles, prendre le temps de se rendre disponible pour bien accompagner le patient, expliquer les choses. En fait, il faut donner le maximum de soi, ne pas avoir l’impression de bâcler la relation avec le patient".

Mais le message de Stéphanie sur le rôle des aidants intègre aussi la part d’optimisme qui doit accompagner l’annonce et la pris en charge d’un cancer : "Il y a des solutions, des traitements qui fonctionnent, il faut toujours garder l’espoir".