C’est la première fois qu’une étude se concentre sur l’impact du stress thermique sur la croissance des fœtus et des nourrissons. Les résultats, loin d’être anodins, montrent que chaque degré compte… “Alors que les taux mondiaux d’émaciation infantile demeurent inacceptablement élevés et que le réchauffement planétaire se poursuit, ces résultats doivent inciter à agir pour améliorer la santé des enfants”, alerte la Dr Ana Bonell, professeure adjointe au MRCG et auteure principale de l'étude
La Gambie, un pays menacé par le réchauffement climatique
Les chercheurs sont partis en Gambie pour réaliser un essai clinique auprès de mères et de leurs nourrissons. Ce pays d’Afrique de l’Ouest n’a pas été choisi au hasard : les températures peuvent y atteindre 45°C et ont augmenté en moyenne de 1°C au cours des soixante dernières années, ce qui représente un risque important pour la population et notamment pour les plus vulnérables.
Dans cet essai, 668 nourrissons ont été suivis au cours de leurs 1.000 premiers jours de vie, avec 329 filles et 339 garçons. Les chercheurs ont analysé la relation entre le stress thermique et la croissance des bébés en se basant sur des scores cliniquement reconnus de poids, de taille et de périmètre crânien pour l’âge gestationnel. Pour les nourrissons de 0 à 2 ans, seuls le poids et la taille ont été utilisés.
Quant au stress thermique -qui est la charge nette de la chaleur que subit l’organisme quand il est exposé à des températures très élevées - il a été défini à l’aide de l’indice climatique thermique universel, qui prend en compte des facteurs tels que la chaleur, l’humidité, la vitesse du vent et le rayonnement solaire. Celui-ci attribue une température équivalente (°C) à un risque associé de développer un stress thermique.
Pendant l’étude, les scientifiques ont noté un niveau moyen d’exposition au stress thermique de 29,6 °C, avec un maximum quotidien le plus élevé à 45,7 °C et un minimum quotidien le plus élevé à 28,9 °C.
Chaque degré supplémentaire entraîne une diminution du poids à la naissance
Résultats : 10 % des nourrissons pesaient moins de 2,5 kg à la naissance (ce qui est jugé comme un poids faible), 33 % étaient plus petits pour leur âge gestationnel. Les chercheurs précisent que chaque augmentation de 1°C du stress thermique quotidien moyen au cours du premier trimestre de grossesse entraîne une diminution du poids à la naissance par rapport à l’âge gestationnel, mais qu’aucun effet n’a été observé en cas de stress thermique au cours du deuxième trimestre. Chez les fœtus exposés au stress thermique au cours du troisième trimestre, les recherches suggèrent qu’il pourrait y avoir une augmentation de la circonférence de la tête par rapport au corps, mais cette hypothèse est moins certaine pour les scientifiques qui préfèrent rester sur la réserve.
Stress thermique : le changement climatique affecte les jeunes enfants
“Notre étude démontre que les crises croissantes du changement climatique, de l'insécurité alimentaire et de la dénutrition affectent de manière disproportionnée les plus vulnérables, notamment les jeunes enfants”, soulève la Dr Ana Bonell, professeure adjointe au MRCG et auteure principale de l'étude. Selon elle, il est maintenant indispensable d’examiner comment l’exposition à la chaleur entraîne de tels résultats. “Il est probable que le stress thermique puisse avoir un impact sur l’appétit, l’apport alimentaire et la disponibilité, et nous étudions déjà s’il peut y avoir des effets directs sur les voies cellulaires et inflammatoires, ajoutant à la capacité déjà réduite des mères enceintes et des nourrissons à réguler leur propre température corporelle”, indique-t-elle.