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Santé et environnement

Un lien découvert entre PFAS, insuffisance rénale et microbiote intestinal

Par Alexandra Wargny Drieghe

Une exposition accrue aux PFAS est associée à des lésions rénales qui pourraient s’expliquer par l’action de ces polluants éternels sur la flore intestinale.

Natali_Mis/Istock
Une étude de preuve de concept menée auprès de 78 personnes montre qu’une exposition accrue aux PFAS entraîne une diminution de la fonction rénale quatre ans plus tard.
Les travaux montrent également que l’exposition aux PFAS modifie potentiellement la composition du microbiome, associée à des niveaux inférieurs de bactéries bénéfiques et à des métabolites anti-inflammatoires inférieurs.
“Cela indique que l'inflammation et le stress oxydatif sont des mécanismes potentiels [pour expliquer la diminution de la fonction rénale, NDLR], c’est donc un domaine sur lequel les recherches futures peuvent se concentrer”, indique l’une des auteures principales de l’étude.

Les PFAS, substances per- et polyfluoroalkylées, sont connus pour augmenter les risques de nombreux troubles de la santé comme les cancers, les maladies cardiovasculaires ou encore les maladies rénales chroniques. Mais les mécanismes biologiques à l’origine de tout cela sont encore mal compris. “Presque tout le monde a des PFAS dans le sang, et ces produits chimiques sont associés à un certain nombre d’effets négatifs sur la santé”, confirme la Dr Hailey Hampson, chercheuse postdoctorale en sciences de la population et de la santé publique à la Keck School of Medicine de l’USC. “Mais nous ne connaissons aucune intervention pour réduire les PFAS dans l’organisme, nous ne pouvons donc pas réellement fournir de recommandations pour aider.

Dans une étude de preuve de concept, la Dr Hampson et ses collègues de la Keck School of Medicine de l’USC se sont spécifiquement intéressés au lien entre les PFAS et les lésions rénales. Leurs travaux, publiés dans la revue Science of the Total Environment, montrent qu’une exposition accrue aux PFAS est associée à une insuffisance rénale quatre ans plus tard, et que des changements dans le microbiome intestinal et les métabolites associés pourraient expliquer jusqu'à 50 % du déclin de la fonction rénale. “Cette étude soulève la possibilité de futures interventions ciblées qui peuvent modifier le microbiome intestinal ou les profils des métabolites circulants pour prévenir les lésions rénales induites par les PFAS”, indiquent les auteurs.

Plus l’exposition aux PFAS augmente, plus le déclin de la fonction rénale croît

Pour mener cette recherche, les données de 78 participants, âgés de 17 à 22 ans et inscrits à la Southern California Children’s Health Study -une étude longitudinale à grande échelle visant à comprendre les effets de la pollution sur la santé- ont été analysées. 56 % de l’échantillon était hispanique car c’est un groupe qui présente un surrisque de maladie rénale chronique.

Pour mesurer l’exposition aux PFAS, les bactéries du microbiome intestinal et les métabolites circulants des participants, les chercheurs ont prélevé des échantillons de sang et de selles au début de l’étude puis quatre ans plus tard. Ils se sont ainsi aperçus que chaque augmentation de l’écart type du score de charge en PFAS de base entraînait une baisse de 2,4 % de la fonction rénale. Ensuite, le groupe de scientifiques a réalisé une analyse statistique pour déterminer si un troisième facteur, à savoir les bactéries intestinales et les métabolites associés, pouvait contribuer à cette association.

L’exposition aux PFAS peut modifier la composition du microbiote intestinal

Nous avons constaté que l’exposition aux PFAS modifiait potentiellement la composition du microbiome, associée à des niveaux inférieurs de bactéries bénéfiques et à des métabolites anti-inflammatoires inférieurs”, explique la Dr Hampson. Dans le détail, l’analyse a révélé qu’une composante conjointe (caractérisée par une réduction de Lachnospiraceae et de 17b-estradiol et une augmentation de succinate, de rétinoate et d’acide dodécanoïque) et une composante métabolite (caractérisée par une augmentation de l’hypotaurine et une diminution de D-pinitol et d’uréidopropionate) ont médié respectivement 38 % et 50 % de l’effet entre le score de charge en PFAS et le taux de filtration glomérulaire (une valeur qui permet de quantifier l’activité du rein). “Cela indique que l'inflammation et le stress oxydatif sont des mécanismes potentiels [pour expliquer la diminution de la fonction rénale, NDLR], c’est donc un domaine sur lequel les recherches futures peuvent se concentrer”, ajoute la spécialiste satisfaite d’avoir une feuille de route pour poursuivre les études.

Nos résultats constituent une pièce importante du puzzle concernant les nombreux risques sanitaires différents des PFAS, qui peuvent fournir aux décideurs politiques des informations qui les aident à élaborer des politiques visant à protéger le public contre l’exposition à ces produits chimiques”, a quant à elle conclu la Dr Jesse A. Goodrich, professeure adjointe de sciences de la population et de la santé publique à la Keck School of Medicine et seconde auteure principale de l’étude.