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Ménadione

La supplémentation en vitamine K pourrait ralentir le cancer de la prostate

Par Stanislas Deve

La ménadione, un précurseur de la vitamine K, pourrait ralentir la progression du cancer de la prostate, selon des études menées sur des souris. 

ratmaner / istock
Des chercheurs ont découvert que la ménadione, un précurseur de la vitamine K, ralentit la progression du cancer de la prostate chez les souris.
Contrairement aux antioxydants, ce composé pro-oxydant, présent naturellement dans certains légumes verts, prive les cellules cancéreuses d’un lipide clé, le PI(3)P, entraînant leur éclatement.
Ces résultats ouvrent la voie à des tests sur des patients humains au stade précoce de la maladie.

Le cancer de la prostate se développe souvent en silence et, bien que traitable dans la majorité des cas, il peut devenir agressif et résister aux thérapies. Mais une récente découverte du laboratoire Cold Spring Harbor (CSHL), aux Etats-Unis, pourrait bien révolutionner la manière de traiter les patients : la ménadione, un précurseur de la vitamine K, ralentirait la progression de la maladie, selon des études menées sur des souris. Ce complément pro-oxydant, présent naturellement dans certains légumes verts, pourrait offrir une nouvelle alternative thérapeutique.

Un processus inédit pour cibler les cellules cancéreuses

Le point de départ de cette découverte remonte à 2001, avec l’étude SELECT du National Cancer Institute, qui testait l’efficacité de la vitamine E, un antioxydant, dans la prévention du cancer de la prostate. Après trois ans, l’étude fut interrompue, les résultats montrant que la vitamine E non seulement n’avait pas d’effet préventif, mais semblait même augmenter les risques de cancer. À l’époque, le professeur Lloyd Trotman, du CSHL, s’est demandé si un traitement pro-oxydant, à l’inverse d’un antioxydant, pourrait mieux fonctionner. Et ses récents travaux, publiés dans la revue Science, semblent confirmer cette hypothèse.

L’équipe de Trotman a découvert que la ménadione interfère avec le métabolisme des cellules cancéreuses de la prostate en épuisant une molécule lipidique, le PI(3)P, essentielle à leur survie. Ce lipide joue un rôle de "badge d’identification" pour les matériaux entrants dans les cellules. Sans ce signal, les cellules sont débordées et incapables de recycler les nutriments essentiels, ce qui provoque une accumulation jusqu’à l’explosion cellulaire. "C’est comme un hub de transport. Sans identification des cargos entrants, tout s’entasse et finit par faire éclater la cellule", explique le Pr Trotman dans un communiqué.

Les résultats chez les souris ont montré une forte réduction de la progression du cancer de la prostate. L’objectif de l’équipe est désormais de tester l’effet de la ménadione chez des patients humains au stade précoce de la maladie, afin de ralentir son évolution sans recourir immédiatement à des thérapies invasives.

Des applications potentielles au-delà du cancer

Ce n’est pas tout : les recherches de Trotman suggèrent que la ménadione pourrait aussi prolonger la vie des enfants atteints de myopathie myotubulaire, une maladie rare qui limite la croissance musculaire. Sur les souris malades, la ménadione a permis de doubler leur durée de vie en diminuant le PI(3)P, tout comme pour les cellules cancéreuses.

Si les résultats se confirment chez l’humain, cette découverte pourrait améliorer la qualité de vie de nombreux patients, offrant non seulement de nouvelles options pour les hommes souffrant du cancer de la prostate, mais aussi un espoir pour les familles d’enfants touchés par cette myopathie.