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Vitamine C

Scorbut : pourquoi la maladie qui décimait les marins revient-elle ?

Par Sophie Raffin

Des médecins tirent la sonnette d’alarme : le scorbut, maladie liée à une carence en vitamine C et vue comme une pathologie du passé, fait à nouveau son apparition dans les hôpitaux.

Gargonia/istock
Un homme de 50 ans vivant en Australie a été diagnostiqué avec le scorbut, trouble causé par une carence en vitamine C.
Les médecins ont découvert que le patient qui avait eu une opération bariatrique 8 ans plus tôt, avait cessé de s'alimenter avec des produits frais et de prendre ses suppléments nutritionnels en raison de difficultés financières.
Les médecins appellent à la vigilance lors des diagnostics car plusieurs cas de scorbut découlant d'une mauvaise alimentation ou de chirurgie de l'obésité ont été rapportés ces dernières années.

Le scorbut - maladie liée à une grave déficience en vitamine C - a décimé des générations de marins qui tentaient de traverser les océans. Ce trouble a progressivement disparu des pays occidentaux au fur et à mesure où l’alimentation s’est améliorée et le rôle des vitamines a été compris.

Des médecins australiens ont été ainsi particulièrement surpris lorsqu’ils ont découvert qu’un de leur patient, un cinquantenaire, en souffrait. Ils rapportent son cas dans la revue BMJ Case Reports et tentent de mettre en garde contre les causes de la réapparition de la maladie.

Un cas de scorbut dans un hôpital australien

Le patient qui habite en Australie Occidentale, s’est rendu à l'hôpital, car des éruptions cutanées très douloureuses étaient apparues brusquement sur ses deux jambes. Biopsie, prise de sang, scanner… Les différents examens menés par le personnel des urgences ne sont pas parvenus à identifier le mal qui progressait. En effet, l’état de ses membres a empiré jusqu'à présenter des ecchymoses et des enflures. Du sang a également été retrouvé dans ses urines.

C’est le point sur son hygiène de vie qui a finalement orienté les médecins. Le patient a révélé avoir perdu son travail et avoir de grosses difficultés financières. Ces dernières l’obligeaient à réduire ses dépenses alimentaires. "Ses repas se composaient principalement d'aliments transformés, dépourvus de légumes ou de fruits", expliquent les auteurs dans le rapport de cas. "Parfois, il sautait les repas, ce qui se produisait plus fréquemment ces dernières semaines."

Alors qu’il s’était fait enlever une partie de l’estomac 8 ans plus tôt pour perdre du poids, l’homme a également cessé de prendre les suppléments de vitamines et de minéraux prescrits après l'intervention, car "il n'était pas en mesure de se permettre" d’en acheter.

Ce sont ces différents éléments qui ont conduit au développement du scorbut selon les médecins. "Notre patient présentait de multiples facteurs de risque, à savoir de mauvaises habitudes alimentaires, l’obésité, une chirurgie bariatrique antérieure, l’utilisation d’inhibiteurs de la pompe à protons et un statut de faible revenu", ajoutent-ils dans leur communiqué.

Cas de scorbut : coût de la vie, alimentation et chirurgie bariatrique en cause ?

Après le diagnostic de scorbut et de carences nutritionnelles, une prise quotidienne de 1.000 mg de vitamine C, de 125 microgrammes de vitamine D3, de 5 milligrammes d'acide folique et de multivitamines a été prescrite au patient. Il a également rencontré un diététicien qui a conçu un plan de repas avec lui. Il devait par exemple manger un citron tous les jours. Petit à petit, son état de santé s’est amélioré. "Cette maladie est facilement réversible avec la supplémentation, avec une réponse spectaculaire observée dans les 24 heures", expliquent les auteurs.

Toutefois, ils rappellent que le scorbut "considéré comme une maladie du passé, en particulier dans les pays développés" reste un danger. "L’augmentation du coût de la vie rend plus difficile pour les familles de se procurer des aliments nutritifs de bonne qualité, alors que de nombreux cas de scorbut résultant de complications suite à une chirurgie bariatrique ont été signalés." Les médecins appellent ainsi les professionnels de santé à la vigilance : "le défaut de traitement peut entraîner une hémorragie catastrophique, par conséquent, la reconnaissance précoce et le traitement rapide sont essentiels", rappellent-ils dans leur article.