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Santé masculine

Maladie cardiaque : les attentes sociales peuvent peser sur le coeur des hommes

Par Diane Cacciarella

Les attentes sociales en termes de masculinité pèsent parfois lourd sur les hommes… Elles pourraient même avoir un impact néfaste sur leur santé cardiovasculaire.

Egoitz Bengoetxea Iguaran/iStock
Plus les participants se rapprochaient du stéréotype masculin durant leur adolescence, moins ils soignaient leur hypertension et leur diabète à l’âge adulte.
Si cela se poursuivait quand ils étaient jeunes adultes, cela était associé à des probabilités plus faibles de diagnostic et de traitement de l'hypertension et du diabète à l'âge adulte.
L’hypertension et le diabète sont des facteurs de risques évitables des maladies cardiovasculaires.

En France, le taux de mortalité cardiovasculaire avant 65 ans est trois fois plus élevé chez les hommes que chez les femmes, selon le ministère de la Santé. Cela aurait-il un lien avec les attentes sociales en termes de masculinité ? Selon une nouvelle étude publiée dans la revue JAMA Network Open, les hommes qui adoptent un comportement proche des stéréotypes masculins, seraient plus à risque d’avoir des problèmes cardiovasculaires.

Cœur : l'adhésion aux stéréotypes masculins impacte la prise en charge

Il est bien connu que le genre et le sexe masculins sont associés à une recherche d’aide moins importante pour toute une série de problèmes de santé, en particulier la santé mentale et les soins primaires, souligne Nathaniel Glasser, l’un des auteurs, dans un communiqué. Dans ce nouvel article, nous avons utilisé des techniques de mesure innovantes pour examiner la construction du genre masculin et son association avec la prévention des maladies cardiovasculaires”. L’objectif de cette étude était de mesurer l'impact des attentes sociales en termes de masculinité sur des facteurs de risques cardiovasculaires modifiables, c’est-à-dire l’hypertension et le diabète.

Pour cela, les scientifiques ont suivi plus de 12.300 personnes - dont 4.230 hommes, parmi lesquels beaucoup étaient adolescents au début de l’étude - entre 1994 et 2018. Ils ont analysé les données de santé et les réponses aux questionnaires recueillies au cours de ces 24 années. Ils ont ainsi évalué l'expression du genre masculin des participants, c'est-à-dire la présence de comportements alignés sur les normes stéréotypées liées à leur sexe dans leur environnement social. En d'autres termes, les chercheurs ont regardé dans quelle mesure les réponses des volontaires masculins aux questions correspondaient à celles de leurs pairs du même sexe.

Résultat : plus les participants se rapprochaient du stéréotype masculin durant leur adolescence, moins ils soignaient leur hypertension et leur diabète à l’âge adulte. Si l'adhésion aux attentes sociétales se poursuivait quand ils étaient jeunes adultes, cela était associé à des probabilités plus faibles de diagnostic et de traitement de l'hypertension et du diabète à l'âge adulte, facteurs de risques évitables des maladies cardiovasculaires. 

Les chercheurs ont aussi remarqué que les hommes qui présentaient une expression de genre plus stéréotypée ne parlaient pas de leurs problèmes de santé. Par exemple, quand le médecin avait déjà abordé la question de la santé cardiaque en consultation avec eux, ils ne le précisaient pas dans les questionnaires. Pire : quand ils étaient diagnostiqués comme ayant une maladie cardiovasculaire, ils n’indiquaient pas qu’ils prenaient un traitement pour la traiter. Oubli qui peut gravement impacter leur prise en charge par des médecins.

Prendre en compte le poids des attentes sociétales dans la prévention

Les auteurs remarquent également que les facteurs de risque examinés dans l'étude comme le diabète et l'hypertension sont des conditions qui seraient normalement détectées par des dépistages courants. "Il n'est pas clair si la diminution du diagnostic et du traitement signalés chez les personnes ayant une expression du genre masculin plus élevée indique que les hommes ne vont pas se faire dépister, qu'ils ne font pas attention à leurs diagnostics même lorsqu'ils sont dépistés ou qu'ils minimisent simplement leurs diagnostics lorsqu'on les interroge. Quelle que soit la raison sous-jacente, les résultats mettent en évidence une occasion manquée de prévenir ou d'atténuer de graves maladies cardiovasculaires plus tard dans la vie", précisent-ils dans leur communiqué.

Toutefois, les chercheurs avancent une hypothèse pour ce silence. Pour eux, "les pressions sociales conduisent à des différences comportementales qui ont un impact sur la volonté de limiter les risques cardiovasculaires, ce qui est inquiétant, car cela pourrait conduire à des résultats de santé à long terme plus mauvais, indique Nathaniel Glasser. Nous voyons comment les pressions pour transmettre l’identité (...) ont un impact sur les comportements de santé”.

Ainsi, pour lui, il est essentiel de prendre en compte la composante du poids des attentes sociétales concernant la masculinité lors de la prévention et la sensibilisation aux risques cardiovasculaires.

En plus de cette composante sociétale, les hommes sont aussi plus à risque de problèmes cardiovasculaires naturellement. En effet, selon l’Assurance Maladie, dès 50 ans, ils ont plus de risque d’avoir un accident cardiovasculaire ou cardiaque. Chez les femmes, c’est à partir de 60 ans que ce risque augmente. Jusqu’à la ménopause, celles-ci sont “plus protégées que les hommes face aux maladies cardiovasculaires”.