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Journée mondiale

BPCO : "Le maître symptôme, c’est l’essoufflement !"

Par Thierry Borsa

Le 21 novembre sera la journée mondiale de la BPCO, responsable en France de près de 20.000 décès par an. Le point sur cette maladie, ses symptômes, son diagnostic et ses traitements avec le Dr Frédéric Le Guillou, pneumologue à Toulon et président de "Santé Respiratoire France".

iStock/Sinenkiy

- Pourquoi Docteur : Quelle définition donneriez-vous de la BPCO ( bronchopneumopathie chronique obstructive) ?

Dr Frédéric Le Guillou : Cela correspond à de la bronchite chronique, c’est-à-dire de l’essoufflement, de la toux, des expectorations. Il s’agit d’une maladie grave qui peut entraîner une dégradation de la qualité de vie et une perte d’autonomie. L’anxiété et la dépression font aussi souvent partir du tableau clinique. Cette maladie touche autant de femmes que d’hommes et il ne faut pas penser qu’il ne s’agit que d’une maladie de l’homme âgé fumeur !

- Quels sont les premiers signes de la maladie ?

Le maitre symptôme c’est l’essoufflement qui peut être extrêmement invalidant et puis on a aussi les bronchites, la toux, l’expectoration. Mais le gros souci, c’est que les patients s’adaptent à leur essoufflement. Donc on doit les interroger pour savoir s’ils sont plus essoufflés que d’autres personnes de leur âge pour les mêmes exercices. On est obligés de trouver des subterfuges !

Deux patients sur trois non diagnostiqués

- Vous sous-entendez que cette maladie serait sous-diagnostiquée ?

Sous-diagnostiquée, le mot est faible ! D’abord il s’agit d’une maladie souvent invisible. Résultat, on estime que deux tiers des personnes qui en sont atteintes ne sont pas diagnostiquées alors que la BPCO est en France la première cause de maladie respiratoire chronique avec 20.000 morts par an et 150.000 patients placés sous oxygène et il faut rappeler que c’est la troisième cause de mortalité dans le monde. C’est donc une maladie extrêmement fréquente et normalement un généraliste devrait en voir deux à trois par jour dans ses consultations !

- Comment expliquer cette difficulté à repérer une BPCO ?

La première raison, c’est que les personnes sous-estiment leurs symptômes. Ensuite, le temps de consultation moyen en médecine générale, c’est à peu près dix minutes au cours desquelles le médecin ne peut pas tout faire. Et puis surtout, dans 80 % des cas cette maladie concerne des fumeurs qui trouvent normal d’être essoufflés !

Dans la moitié des cas, les patients sont diagnostiqués lors d’une poussée de la maladie qui a conduit à une hospitalisation, c’est-à-dire que tout a été loupé dans la détection avant. Et ces poussées que l’on appelle exacerbations, c’est à la BPCO ce que l’infarctus est à la maladie coronaire ! Cela permet de bien comprendre à quel point il s’agit d’une maladie grave. À partir du moment où l’on fait plus de deux exacerbations par an, l’espérance de vie à quatre ans tombe à 30 % …

Une maladie liée au tabagisme, à la pollution et aux infections respiratoires

- On sait que la BPCO est principalement liée au tabagisme. Mais existe-t-il d’autres causes ?

La principale cause est en effet le tabagisme, mais comme autres causes possibles, tout ce qui impacte les bronches pendant la grossesse et au cours de l’enfance peut être à l’origine d’une BPCO, le tabagisme maternel, le tabagisme passif au cours de la petite enfance, la prématurité, les infections respiratoires à répétition chez les enfants comme les bronchiolites peuvent être des causes et puis bien sûr la pollution, l’exposition à des fumées. Et puis il y a les causes professionnelles, par exemple chez les agriculteurs avec tout ce qui était produits phytosanitaires et pesticides et aussi les travailleurs de la sidérurgie.

- À partir de quel âge la maladie peut-elle apparaître ?

La BPCO peut apparaître à n’importe quel âge. Le plus fréquemment, c’est à partir de 40 ans, mais chez les jeunes qui ont commencé à fumer très tôt ou chez les fumeurs de cannabis, on peut voir des BPCO à 25 ans.

- Quels sont les traitements ?

Il faut d’abord rappeler que la BPCO est une maladie dont on ne guérit pas mais dont on peut éviter la dégradation. Le premier traitement, c’est avant tout l’arrêt de l’exposition aux produits toxiques. Le deuxième, c’est d’avoir une activité physique régulière qui permet d’entretenir la capacité respiratoire. En matière de prévention pour éviter les poussées de la maladie, il faut éviter les infections et donc bien se faire vacciner contre la grippe, la coqueluche et le pneumocoque. Et puis il y a les thérapies inhalées, les broncho-dilatateurs y compris corticoïdes. Pour les formes les plus graves, on a recours à de l’oxygène, voire à de la ventilation non invasive. Et la BPCO est la première cause de transplantation pulmonaire.

- Comment améliorer la prévention des formes graves de la BPCO ?

Il y a beaucoup à faire en termes de détection. Plus on repère cette maladie précocement, plus elle peut être prise en charge aux stades les moins avancés. Mais le plus important reste d’éviter les poussées de la maladie qui peuvent rapidement déboucher vers une perte d’autonomie et le handicap social que cela représente. Il est donc essentiel de bien prendre son traitement de fond et par ailleurs on peut préconiser pour les formes sévères une télésurveillance qui permet de repérer les prémices de ces exacerbations avec plusieurs jours d’avance.