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MICI : une nouvelle piste pour accélérer la guérison

Par Stanislas Deve

Des chercheurs ont identifié un mécanisme clé qui, chez les patients souffrant de maladies inflammatoires chroniques de l’intestin, ralentit la réparation des tissus. Une avancée qui pourrait ouvrir la voie à de nouveaux traitements.

champpixs /istock
Une nouvelle étude révèle un mécanisme spécifique qui freine la réparation intestinale chez les patients atteints de maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI), comme la maladie de Crohn.
Une protéine, l’interféron lambda (IFN-λ), bloque la régénération de la muqueuse en activant une cascade moléculaire qui détruit les cellules souches intestinales. Ce processus, conçu pour éliminer les cellules infectées, reste actif même après la phase aiguë de l’inflammation.
Bloquer l’IFN-λ pourrait favoriser la cicatrisation et améliorer la rémission. Ce qui ouvre de nouvelles perspectives pour les traitements des MICI.

Les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI), qui affectent plus de 250.000 personnes en France, regroupent la maladie de Crohn et la rectocolite hémorragique aiguë. Elles se manifestent par une inflammation chronique de l’intestin provoquant douleurs abdominales et diarrhées. Si les traitements actuels, comme les anti-inflammatoires, atténuent les symptômes, seule la moitié des patients atteignent une rémission complète. Pour les autres, la muqueuse intestinale reste partiellement cicatrisée, augmentant le risque de rechutes.

Une étude internationale, publiée dans la revue Cell, vient toutefois de mettre en lumière un mécanisme clé qui empêche justement la guérison complète des intestins chez les patients atteints. Une découverte qui pourrait révolutionner les traitements contre ces pathologies chroniques particulièrement débilitantes.

Une voie moléculaire qui empêche la réparation de l'intestin

Les scientifiques, issus de plusieurs centres de recherche, dont le CNRS, ont mis en avant le rôle inattendu de l’interféron lambda (IFN-λ) – une protéine normalement impliquée dans la lutte antivirale – dans le ralentissement de la réparation de la muqueuse intestinale. Chez les patients atteints de MICI, cette protéine bloque en effet la régénération de la couche épithéliale de l’intestin, essentielle à sa réparation.

À l’aide de modèles de souris transgéniques et d’organoïdes intestinaux (des "mini-intestins" cultivés en laboratoire), les scientifiques ont pu retracer la voie moléculaire activée par l’IFN-λ. Ils ont constaté que la protéine, anormalement élevée, stimule une production excessive de ZBP1, une autre molécule qui déclenche la destruction des cellules souches intestinales.

Or, ce mécanisme, conçu pour éliminer les cellules infectées par des virus, se dérègle dans les MICI. Même en l’absence d’infection, l’inflammation chronique peut activer ZBP1, empêchant la réparation intestinale. Plus surprenant encore, ce mécanisme reste actif au-delà de la phase aiguë de l’inflammation, ralentissant la guérison même lorsque les traitements actuels réduisent l’inflammation. "Cette découverte est particulièrement importante dans un contexte thérapeutique, car les thérapies actuelles peuvent calmer l'inflammation mais n'aboutissent souvent pas à une guérison complète", précise le CNRS dans un communiqué.

Vers une nouvelle approche thérapeutique

Ces découvertes ouvrent des perspectives prometteuses, estiment les chercheurs. En bloquant les interférons lambda, il serait possible de restaurer la capacité de régénération des intestins. Cela améliorerait non seulement la cicatrisation, mais aussi la qualité de vie des patients, tout en réduisant le risque de complications graves.

Pour les scientifiques, cette étude illustre aussi l’importance de repenser les stratégies thérapeutiques. Plutôt que de se limiter à calmer l’inflammation, de futures thérapies pourraient cibler la réparation des tissus endommagés, offrant ainsi aux patients une chance de rémission véritable et durable.