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Tolérance

Une nouvelle piste pour gérer la douleur sans augmenter les opioïdes

Par Diane Cacciarella

Des chercheurs ont découvert une piste prometteuse pour amplifier l'effet anti-douleur des opioïdes sans pour autant devoir en augmenter les doses, évitant ainsi le problème de tolérance.

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Une nouvelle étude offre une piste pour ne pas augmenter les doses d’opioïdes tout en amplifiant l’effet analgésique de ces médicaments.
Grâce à un inhibiteur appelé BDT001, administré au même moment que la morphine, les chercheurs ont réussi à prévenir l’apparition de la tolérance et de l’hyperalgésie chez des souris.
De plus, le potentiel analgésique de la morphine était plus important, sans augmenter les effets indésirables des opioïdes.

Près de 30 % des adultes souffrent de douleurs chroniques selon l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). Parmi eux, certains prennent des opioïdes, des médicaments qui soulagent la douleur, comme le tramadol, la morphine et le fentanyl. Ces médicaments sont généralement efficaces à court terme. Mais, sur la durée, les patients atteints de douleurs chroniques sont confrontés à deux problèmes : la tolérance et l’hyperalgésie, qui est une sensibilité plus forte à la douleur induite par les opioïdes. Ainsi, pour obtenir le même effet analgésique qu’au début, ils doivent augmenter les doses et, à force, l’efficacité diminue.

Une piste pour ne pas augmenter les doses d’opioïdes

Des chercheurs de l’Université de Montpellier, de l’Inserm et du CNRS, en collaboration avec la société Biodol Therapeutics, ont travaillé sur ce sujet. L'objectif de leur étude, publiée dans la revue Nature Communications, était de trouver des solutions pour ces patients afin qu’ils n’aient plus à augmenter les doses pour soulager leur douleur. Pour cela, ils ont d’abord travaillé à comprendre les raisons de la tolérance et de l’hyperalgésie : une co-expression du récepteur MOR et du récepteur tyrosine kinase FLT3, qui participerait au développement de ces deux phénomènes. 

Ensuite, les scientifiques ont utilisé un inhibiteur appelé BDT001 pour perturber l’effet de ce récepteur FLT3 nouvellement identifié. Le test a été mené sur des souris, en administrant BDT001 au même moment que la morphine. Résultats, l’inhibiteur a permis, d'une part, de prévenir l’apparition de la tolérance et de l’hyperalgésie, et d'autre part, d’amplifier le potentiel analgésique de la morphine sans augmenter les effets indésirables des opioïdes.

De plus, chez les rongeurs ayant déjà été exposés aux opioïdes, ce traitement par l’inhibiteur BDT001 a permis de supprimer les phénomènes de tolérance et d’hyperalgésie. Ainsi, l’efficacité de la morphine était comme lors des premières prises d’opioïdes, voire même meilleure.

Augmenter les quantités d’opioïdes expose à des risques

Nos résultats suggèrent que l’association de la morphine et des inhibiteurs de FLT3 pourrait devenir une voie prometteuse pour la gestion de la douleur chronique afin d’exploiter en toute sécurité la puissance des opioïdes, sans risque d’augmenter les doses voire de les diminuer afin de réduire l’ensemble des effets secondaires”, explique Cyril Rivat, chercheur à l’Institut des Neurosciences de Montpellier (INM), dans un communiqué.

Un enjeu de santé majeur car, en plus des effets de tolérance et d’hyperalgésie, l’augmentation des quantités d’opioïdes consommés peut entraîner des effets secondaires, comme des difficultés respiratoires, et des risques d’addiction. D’après l’Organisation mondiale de la santé (OMS), en 2019, près de 80 % des 0,6 million de décès attribuables à la consommation de drogues étaient liés aux opioïdes, la cause de mortalité étant une surdose dans environ 25 % de ces cas.