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Pollution

Microplastiques : les trois quarts des sols français seraient contaminés

Par Stanislas Deve

Les sols agricoles, comme ceux des grandes cultures ou des vergers, sont les plus touchés par cette pollution aux microplastiques, à l’inverse des forêts, relativement épargnées, selon une étude de l’agence environnementale Ademe.

Svetlozar Hristov / istock
Une étude de l'Ademe révèle que 76 % des sols français contiennent des microplastiques, inférieurs à 5 millimètres de diamètre, principalement des polymères présents dans les emballages.
Cette pollution provient de sources multiples : décharges, paillages plastiques, engrais enrobés, recours aux eaux usées pour l’irrigation, ruissellement... Les microplastiques sont aussi massivement introduits par les produits résiduaires organiques (PRO), comme les boues de stations d’épuration ou les composts.
L'Ademe recommande de limiter l'usage des plastiques, d'améliorer le tri des biodéchets et d'accélérer les recherches sur les impacts environnementaux et sanitaires.

On savait déjà qu’ils s’accumulaient dans les océans et menaçaient les écosystèmes marins, mais même les sols français sont aujourd’hui massivement pollués aux microparticules de plastique. C’est la conclusion d’une étude inédite de l’Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), publiée le 26 décembre. Prairies, vignes, vergers, zones de cultures... "Le plastique est partout, même le lisier des vaches en contient", alerte Isabelle Deportes, ingénieure à l’Ademe.

Une présence systématique dans les sols agricoles

Pour la première fois, l’étude, réalisée en collaboration avec l’Institut national de la recherche agronomique (Inrae), a analysé 33 échantillons de sol représentatifs de différents usages. Les résultats sont sans appel : 76 % des sols testés (25 échantillons) contiennent des microplastiques, c’est-à-dire des fragments inférieurs à 5 millimètres de diamètre, avec une moyenne de 15 microparticules par kilogramme de sol sec, principalement du polyéthylène et du polypropylène, des polymères majoritairement présents dans les emballages. Les sols agricoles, comme ceux des grandes cultures ou des vergers, sont les plus touchés, à l’inverse des forêts, relativement épargnées.

Cette pollution provient de sources multiples : décharges, paillages plastiques, engrais enrobés, recours aux eaux usées pour l’irrigation, ruissellement... Une majorité est directement liée aux activités agricoles. Environ 430.000 tonnes de films plastiques sont utilisées chaque année en Europe pour l’agriculture, rappelle l’Ademe. Même les paillages dits "biodégradables" laissent des fragments de plastique dans les sols plusieurs années après leur usage.

Les microplastiques sont aussi massivement introduits par les produits résiduaires organiques (PRO), comme les boues de stations d’épuration ou les composts, qui permettent de réduire le recours aux engrais de synthèse. Sur 167 échantillons analysés sur l’ensemble du territoire, 166 comprennent en effet des microplastiques. Selon l’Ademe, ces épandages déversent chaque année entre un million et un milliard de particules de plastique par hectare de sol agricole.

Réduire l’usage du plastique pour les emballages

La loi anti-gaspillage de 2020 prévoit d’interdire les composts issus de la poubelle grise d’ici 2027, mais l’Ademe appelle à agir sans attendre. Elle recommande d’améliorer la collecte des biodéchets et de réduire l’utilisation des plastiques dans les emballages, principaux responsables de cette pollution. Fait notable, près de 75 % des microplastiques retrouvés dans les sols sont inférieurs à 1 mm de diamètre, ce qui risque de poser un défi en matière de règlementation. "Les textes qui encadrent les fertilisants fixent des seuils seulement pour des ‘impuretés plastiques’ supérieures à 5 mm et, théoriquement, bientôt à 2 mm", précise Le Monde.

"Comme on l’a fait pour les milieux aquatiques, il est désormais urgent d’accélérer la recherche pour évaluer les conséquences de cette contamination terrestre sur l’environnement et la santé humaine", insiste Isabelle Deportes. En complétant ses recherches par l’étude des sols urbains et ultramarins, l’Ademe espère proposer des solutions concrètes pour endiguer cette pollution silencieuse qui menace durablement la qualité des sols et les écosystèmes terrestres.