Des immeubles en béton inesthétiques, des zones industrielles austères, des rues désertes et sans vie… Les villes “moches” ne sont pas juste une plaie pour les yeux, elles sont aussi mauvaises pour la santé.
Il faut le reconnaître cette hypothèse, provenant en grande partie des travaux de l’écrivaine et militante américaine Jane Jacobs ou encore de ceux de l’architecte danois Jan Gehl, n’a pas eu un écho énorme chez les urbanistes lors de son apparition au cours de la seconde moitié du XXᵉ siècle. Mais, elle a, aujourd’hui, fait des émules. Elle est même à l’origine d’un nouveau champ des neurosciences appelé la neuroarchitecture, comme le rapporte le journal américain Wired dans un article paru le 2 janvier 2025.
Une “mauvaise” architecture impacte négativement la santé et le cerveau
Ces dernières années, la neuroarchitecture a fait des avancées de taille concernant l’impact de l’urbanisme sur le cerveau grâce aux nouvelles technologiques. Les chercheurs ont, entre autres, pu réaliser des cartographies cérébrales et des études comportementales précises en utilisant des appareils connectés qui mesurent les réponses du corps en conditions réelles. Cela a permis aux scientifiques d'apporter les données scientifiques tangibles, et manquantes auparavant.
Plusieurs expériences ont été lancées. Par exemple, Colin Ellard, directeur du Laboratoire des réalités urbaines à l’Université de Waterloo (Canada), conduit depuis 2024 une étude internationale sur les réponses psychologiques des gens face à différentes façades de bâtiments, en collaboration avec Humanise Campaign. En parallèle, des travaux de l’université de Cambridge ont été réalisés pour déterminer si l’apparence d’un édifice pouvait entraîner une neuroinflammation. Les éléments réunis lors de ces recherches révèlent un lien entre l'apparence d'un bâtiment et la santé.
L’UE soutient de son côté, le projet eMOTIONAL Cities mené à Lisbonne (Portugal), Londres (Royaume-Uni), Copenhague (Danemark) et dans plusieurs villes du Michigan (États-Unis). L’objectif est de cartographier la réactivité neurobiologique des habitants pour “favoriser une conception urbaine plus inclusive se traduisant par une meilleure santé et un meilleur bien-être individuel”.
Des travaux scientifiques qui inspirent les architectes
L’ensemble de ces recherches sur la conception d’une ville et l'impacts sur la santé commencent à porter leurs fruits. Plusieurs cabinets d’architecture utilisent leurs données lors du développement deprojets.
Par exemple, le cabinet danois NORD Architects a dessiné un village Alzheimer à Dax en s’inspirant des informations recueillies sur le déclin cognitif. Il a ainsi imaginé une maison de retraite qui imite l’agencement d’une bastide médiévale fortifiée. "L’idée était de créer un design familier et réconfortant pour de nombreux résidents dont les capacités d’orientation se sont affaiblies avec l’âge", explique le journal Wired.