Le dépistage du cancer du col de l’utérus serait encore bénéfique même au-delà de 65 ans. Selon une étude britannique, le dépistage par frottis continuerait de sauver des vies s’il était maintenu jusqu’à l’âge de 69 ans. Un résultat qui bouscule les recommandations en vigueur, puisque aujourd’hui en France, comme en Angleterre et aux USA, le dépistage est recommandé pour toutes les femmes entre 25 et 65 ans, ayant eu au moins un rapport sexuel.
Dans cette étude publiée dans la revue PLoS Medicine, les chercheurs ont analysé les données de 1341 femmes âgées de 65 à 83 ans en Angleterre et au Pays de Galles qui ont été diagnostiquées avec un cancer du col entre 2007 et 2012. Ils les ont comparées à celles de femmes de la même tranche d’âge qui n’ont pas eu de cancer cervical.
Premier résultat : le dépistage jusqu'à l'âge de 65 ans réduit considérablement le risque de cancer du col utérin au cours de la décennie suivante : un dépistage au moins tous les 5 ans entre les âges de 50 et 64 a été associé à une réduction du risque de cancer de 75 % chez les femmes 64 à 79 ans.
Un résultat important pour le Pr Peter Sasieni, co-auteur de l’étude, car il permet de trancher le débat sur la stratégie de dépistage « Il y avait très peu de preuves de cette efficacité jusqu'à présent et donc il y avait des gens qui disaient : en fait, nous n'avons pas besoin de poursuivre le dépistage après l'âge de 50 ans. Selon eux, il suffit de faire un test HPV au début de la cinquantaine et si c'est négatif, il n'y a pas besoin de plus de contrôle. Ils estiment que les femmes ne risquent pas d’avoir une nouvelle infection par papillomavirus ».
Le Pr Sasieni pense le contraire : « Les femmes vivent plus longtemps, elles sont plus susceptibles d'avoir plus de partenaires sexuels après l' âge de 55 ans et leurs maris sont plus susceptibles d'avoir des aventures extra-conjugales. Donc arrêter le dépistage à 55 ans ne semble pas être rationnel. »
Pour le Dr Frédéric de Bels, responsable du département dépistage à l’Institut national du cancer, ces résultats devraient encourger les femmes à poursuivre le dépistage après 50 ans d’autant que les recommandations françaises, un frottis tous les trois ans, permettent de réduire encore plus les risques.
Ecouter le Dr Frédéric de Bels, responsable du département dépistage à l’INCA: « En France, la fréquence du dépistage permet de réduire les risques de 90 % »
Les auteurs de l’étude publiée dans PLoS Medicine estiment qu’il faudrait même prolonger le dépistage jusqu’à 69 ans. « La protection s’affaiblit avec le temps et est sensiblement réduite 15 ans après le dernier examen. Au regard de l'espérance de vie, (près de 85 ans pour les femmes selon l’INSEE ndlr) il semble inapproprié pour les pays de stopper le dépistage entre 60 et 69 ans ». Un point de vue qui n’est pas partagé par le Dr Frédéric de Bels qui souligne qu’en France, près de 32 % des femmes poursuivent le dépistage après 65 ans.
« Mais pour nous, la priorité, c’est de faire en sorte que toutes les femmes participent correctement au dépistage entre 25 et 65 ans. Seulement 60 % des femmes participent au dépistage, et ce taux diminue sensiblement chez les femmes entre 50 et 65 ans, mais aussi chez les femmes qui habitent dans des zones où il y a moins de gynécologues ». L’INCa a d’ailleurs lancé cette semaine une nouvelle campagne d’information pour rappeler aux femmes que le frottis pouvait être réalisé par le médecin traitant, ou dans des laboratoires d’analyse sur prescription d’un médecin, ou directement chez une sage-femme.
Ecouter le Dr Frédéric de Bels, responsable du département dépistage à l’INCA.« Le frottis n’est pas à réaliser forcément chez un gynécologue. »