- Des chercheurs australiens ont mis au point une technique innovante pour lutter contre les maladies tropicales comme le paludisme ou la dengue : le "mâle toxique".
- En modifiant génétiquement des moustiques mâles pour que leur sperme contienne des protéines venimeuses, ils réduisent l’espérance de vie des femelles après l’accouplement, freinant ainsi la transmission des maladies.
- Plus rapide et moins coûteuse que les méthodes classiques, cette approche promet des résultats durables sans nuire aux espèces bénéfiques. Toutefois, des tests supplémentaires sont nécessaires pour évaluer son innocuité environnementale et sociétale.
Et si une solution révolutionnaire pour lutter contre des maladies tropicales comme le paludisme ou la dengue résidait dans le sperme de moustiques génétiquement modifiés ? C’est ce que proposent des chercheurs australiens dans une étude récente publiée dans Nature Communications. La technique, baptisée "mâle toxique", repose sur des moustiques dont le sperme contient des protéines venimeuses, fatales pour les femelles après l’accouplement. Une approche qui suscite autant d’espoir que de questions éthiques et scientifiques.
Un mécanisme prometteur contre les femelles
Parmi les moustiques, seules les femelles piquent et transmettent des maladies infectieuses. En réduisant leur espérance de vie grâce à ces protéines toxiques, la propagation des maladies pourrait être freinée rapidement. Selon Sam Beach, chercheur à l’université australienne Macquarie, "cette méthode pourrait fonctionner aussi rapidement que les pesticides, sans faire de mal aux espèces bénéfiques". Il estime dans un communiqué que cette technique "offre l’espoir de communautés en meilleure santé et d’un futur plus durable".
Les premiers tests menés sur des mouches du vinaigre, une espèce couramment utilisée en laboratoire, ont montré des résultats prometteurs. Les femelles ayant été fécondées par des mâles "toxiques" ont en effet vu leur durée de vie réduite de 60 %. La prochaine étape consistera à tester cette approche sur des moustiques, afin d’évaluer son efficacité tout en écartant les risques "pour les humains et les espèces non ciblées", comme le précise Maciej Maselko, un autre chercheur impliqué dans l’étude.
Vers un futur sans moustiques nuisibles ?
Jusqu’à présent, les stratégies de lutte incluaient la stérilisation des mâles ou l’introduction de gènes mortels. Or, ces techniques réduisent les populations de moustiques, mais elles n’empêchent pas les femelles de continuer à piquer tant qu’elles sont vivantes. En comparaison, la méthode du "mâle toxique" agit plus rapidement et pourrait être mise en œuvre de façon ciblée, selon les scientifiques. Autre avantage : cette approche nécessiterait moins d’insectes modifiés, réduisant ainsi les coûts de production.
Toutefois, des interrogations subsistent : quels seront les impacts écologiques à long terme ? Et que se passerait-il si les moustiques développaient une résistance à ces modifications ? Malgré ces incertitudes, les chercheurs sont confiants. Des simulations par ordinateur suggèrent que cette technologie pourrait non seulement réduire les épidémies de maladies tropicales, mais aussi s’adapter à d’autres nuisibles agricoles. Pour Sam Beach et ses collègues, l’objectif final reste clair : mettre au point une solution efficace et durable, tout en garantissant la sécurité environnementale et sociétale.