L’eau du robinet est-elle sûre pour notre santé ? Des recherches menées par l’UFC-Que Choisir et Générations Futures, dont les résultats ont été dévoilés ce 23 janvier 2025, sèment de nouveau le doute. Jugée “préoccupante” par ses initiateurs, cette étude révèle une “présence massive” de PFAS -substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées- dans l’eau du robinet.
De Lille à Narbonne : une “large présence” de PFAS dans 96 % des communes testées
Lille, Rouen, Amiens, Strasbourg, Paris, Tours, Lyon ou encore Tavaux et Lunel… Les analyses montrent une “large présence [de polluants éternels,ndlr] détectée dans 96 % des communes testées” de l'Hexagone. Si les concentrations restent à des niveaux autorisés par les normes réglementaires instaurées par la France, ces dernières sont “bien moins strictes que celles d’autres pays”. En l’occurrence, la norme choisie est une limitation de la somme de 20 PFAS spécifiques à 100 ng/l. Si l’on prend la norme américaine par exemple, fixée à 4 ng/l pour 2 PFAS, “6 prélèvements (sur 30) dont ceux de Rouen et Amiens seraient considérés comme non conformes”, précise le communiqué. Autre comparaison proposée en se plaçant chez les Danois qui ont une norme encore plus stricte que les Américains : dans ce cas, 15 prélèvements sur les 30 effectués dépasseraient les seuils admissibles, notamment à Bordeaux et Lyon.
Ainsi, “les résultats sont alarmants”, nous disent les deux organismes et ce, pour plusieurs raisons :
-Une présence importante de TFA -acide trifluoroacétique- un métabolite souvent issu de la dégradation du flufénacet, un herbicide reconnu comme perturbateur endocrinien : “le TFA a été détecté dans 24 prélèvements sur 30, notamment à Paris ou dans des communes des agglomérations de Poitiers et Orléans”. Si l’on compare les concentrations détectées aux limites applicables aux pesticides, elles dépasseraient les seuils dans 20 prélèvements.
-L’effet cocktail : “certaines zones, comme Tours ou les environs de Rouen, présentent un véritable cocktail chimique, avec respectivement 10 et 11 PFAS différents relevés dans un seul prélèvement”.
PFAS : faut-il arrêter de boire l’eau du robinet ?
Ce rapport montre que la contamination aux PFAS est diffuse sur le territoire français et l’eau en bouteille n'y échappe pas, indique Générations Futures. “Il y a des teneurs en TFA élevées dans l’eau en bouteille également, avec en plus, une contamination par les micro et nano plastiques”, ajoute la toxicologue Pauline Cervan lors d’une conférence de presse tenue ce jour. “Les consommateurs ne peuvent pas échapper à cette pollution”, déplore-t-elle. Selon la spécialiste, les filtres de charbon actif ne sont pas une “solution miracle” car on sait qu’ils ne sont pas efficaces sur le TFA et on ne connaît pas vraiment leur efficacité sur les autres PFAS.
Selon l’UFC-Que Choisir et Générations Futures, la priorité est donc la prévention. Ils appellent les autorités sanitaires françaises à évaluer précisément le danger induit par le TFA et à l’intégrer au plan de contrôle de l’eau du robinet, à adopter des normes plus strictes concernant les PFAS et renforcer les contrôles des rejets industriels “en interdisant les pesticides classés comme PFAS”. L’association de consommateurs et l’ONG demandent également aux parlementaires de voter “sans délai” la proposition de loi adoptée en première lecture au parlement, visant à interdire ces substances dans les produits du quotidien, à réduire drastiquement les rejets industriels et à imposer aux entreprises de financer la dépollution.