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Essai sur une maladie génétique de la vue

Thérapie génique : un espoir grandissant pour les aveugles

Par Melanie Gomez

Les résultats d'un essai de thérapie génique dans une maladie rare de la vue confirment l'espoir de guérir un jour des maladies plus courantes comme la DMLA ou certaines formes génétiques de cécité.  

DURAND FLORENCE/SIPA
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Alors que les progrès de la thérapie génique ne cessent de faire parler d’eux, une nouvelle étude publiée dans Le Lancet confirme l’espoir que cette nouvelle forme de traitement suscite notamment dans les maladies génétiques de l’œil. Réalisée chez 6 patients âgées de 35 à 63 ans et atteints de choroideremia, une pathologie incurable rare entraînant une perte progressive de la vision à cause notamment d’une dégénérescence de la rétine, cette étude semble très prometteuse.

 

Un gène médicament qui a stabilisé la maladie et amélioré la vue

Dans cette pathologie, les cellules de détection de la lumière située à l'arrière de l'œil meurent progressivement. « Cette dégénérescence cellulaire est assez lente, ce qui offre une assez grande fenêtre de temps pour intervenir avant le début de la perte visuelle », explique le Pr Robert MacLaren de l'Université d'Oxford qui a dirigé ce travail. Cette équipe a donc injecté dans la rétine de ces 6 malades, un vecteur capable de délivrer un gène-médicament permettant de stopper la dégénérescence des cellules oculaires. A l’issue de l’étude, le Pr Robert MacLaren a déclaré qu'il était «absolument ravi » des résultats. Le site BBC news qui avait couvert le lancement de cet essai clinique rapporte par exemple les excellents résultats obtenus chez le 1er patient traité.

Alors que Jonathan Wyatt, 63 ans était encore capable de voir légèrement au début du traitement, cette expérience de thérapie génique lui a permis de non seulement stabiliser sa vision, mais surtout de l’améliorer. Aujourd’hui il est capable de lire 3 lignes plus bas sur le classique panneau de contrôle de contrôle de la vision des opticiens. «Nous n'aurions pas pu rêver d'un meilleur résultat, » ajoute l’auteur principal. Globalement, 6 mois après l’injection du gène-médicament, les 6 patients ont récupéré au minimum leur acuité visuelle d'avant la procédure, et deux patients ont donc montré une amélioration visuelle considérable. Autre fait important, les patients ont développé également une meilleure sensibilité à la lumière et une vision nocturne de meilleure qualité. « Les couleurs des arbres et des fleurs me semblent beaucoup plus vives et j'ai pu voir des étoiles pour la première fois depuis que j'ai 17 ans, le moment où ma vue a commencé à se détériorer, a déclaré l’un des patients traités dans cette étude à BBC News.

 

Un traitement qui pourrait soigner certaines formes de cécité

« J'ai vécu les 25 dernières années avec la certitude que j’allais devenir aveugle et maintenant, il y a une possibilité pour que je conserve la vue" a déclaré l’un des patients à BBC News. Alors que cet homme, lorsqu’il a été diagnostiqué, pensait ne pas avoir la chance de voir sa fille âgée de 9 ans grandir, à présent il se réjouit d’avoir peut être même un jour la possibilité de voir grandir ses petits-enfants. Si les améliorations observées chez ces patients se poursuivent, les auteurs espèrent pouvoir offrir ce traitement à de jeunes patients atteints par cette même maladie, afin de leur éviter de perdre la vue un jour. Selon le Pr MacLaren : « Nos résultats sont très prometteurs et permettent de penser que la thérapie génique pourrait être employée pour prévenir la perte de la vue dans d'autres maladies de la rétine comme la dégénérescence maculaire liée à l'âge (Ndlr, DMLA) ». En effet, la choroideremia a des similitudes avec la DMLA, ce sont les mêmes cellules qu’il faudrait réparer d’après ces chercheurs. Même s’ils avouent ne pas savoir pour le moment quel gène il faudrait cibler précisément, pour envisager guérir cette autre pathologie, le principal selon eux, est que désormais ils savent comment le faire.

 

La communauté scientifique s'enthousiasme face à ces résultats

Dans un commentaire publié simultanément dans le Lancet, d’autres spécialistes internationaux font part de leur enthousiasme vis à vis de cette étude. «Le but ultime de la thérapie génique dans la choroideremia serait de sauver la rétine centrale de la dégénérescence. La durée de suivi courte de cette nouvelle étude empêche toute conclusion sur la prévention de la dégénérescence à long terme … Même si l'effet se révèle être seulement léger, cela pourrait avoir des répercussions positives importantes, car il y a des moyens thérapeutiques supplémentaires ciblant les photorécepteurs qui pourraient aider à sauvegarder ou à restaurer la fonction visuelle » explique conjointement le Pr Hendrik Scholl de l'Université John Hopkins aux Etats-Unis, et le Pr José Sahel, de l'Institut de la Vision à Paris.