- Les troubles psychiatriques partagent souvent des bases génétiques communes, ce qui complique leur diagnostic. Une étude a analysé 136 zones du génome associées à huit troubles majeurs (dépression, schizophrénie, autisme...) et identifié 683 variantes génétiques ayant un impact sur la régulation des gènes.
- Parmi elles, les variantes pléiotropiques, actives dans plusieurs troubles psychiatriques, jouent un rôle clé dans le développement du cerveau et offrent des cibles prometteuses pour des thérapies.
- Comprendre ces mécanismes pourrait permettre de traiter plusieurs troubles simultanément, ouvrant la voie à des avancées majeures en psychiatrie.
Il arrive fréquemment que des troubles psychiatriques distincts présentent des symptômes communs, ce qui rend leur diagnostic particulièrement complexe. Par exemple, pourquoi la dépression et l’anxiété, ou encore l’autisme et le TDAH (trouble déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité) coexistent-ils si souvent ? D’après une nouvelle étude publiée dans la revue Cell, la réponse à cette question, ou du moins une partie, résiderait dans notre patrimoine génétique.
Des "points chauds" génétiques liés aux troubles psychiatriques
Les chercheurs de l’Université de Caroline du Nord (Etats-Unis) se sont appuyés sur une étude de 2019 qui avait identifié 136 "points chauds" (hot spots) dans le génome associés à huit troubles psychiatriques majeurs, comme la schizophrénie, la dépression ou encore le trouble obsessionnel compulsif (TOC). Parmi eux, 109 étaient partagés par plusieurs troubles : un phénomène appelé pléiotropie, où une variation génétique influe sur plusieurs conditions. Mais la façon dont ces variations affectent spécifiquement un trouble ou plusieurs restait jusqu’ici floue.
La nouvelle étude apporte un éclairage inédit en explorant les conséquences fonctionnelles de ces variations génétiques. Grâce à une technologie de pointe, les chercheurs ont étudié l’impact de quelque 17.000 variations génétiques issues des 136 points chauds, en les insérant dans des cellules neuronales humaines. Ils ont ainsi identifié 683 variations ayant un effet mesurable sur la régulation des gènes, un processus crucial qui détermine la production des protéines nécessaires au fonctionnement du cerveau.
Mieux traiter les multi-troubles psychiatriques
Ces variations ont été divisées en deux catégories : les variants pléiotropiques (communs à plusieurs troubles) et les variants spécifiques à un seul trouble. Les premiers se sont révélés plus actifs et sensibles aux changements que les seconds. Ce qui suggère que les variations pléiotropiques jouent, par rapport aux autres, un rôle prolongé dans le développement du cerveau, contribuant ainsi potentiellement à divers troubles.
Les gènes touchés par ces variants pléiotropiques sont étroitement connectés à d’autres protéines, ce qui signifie que toute perturbation peut provoquer des effets en cascade dans le cerveau. "Si nous parvenons à comprendre la base génétique de la pléiotropie, cela pourrait permettre de développer des traitements inédits ciblant ces facteurs génétiques partagés", estiment les auteurs de l’étude dans un communiqué. Plutôt que de cibler un trouble isolé, il serait possible de développer des thérapies basées sur ces variations communes, offrant une solution pour plusieurs troubles simultanément.