- En 2024, les greffes d’organes en France ont dépassé les niveaux d’avant Covid avec 6 .034 transplantations, soit une hausse de 7,1 %, selon l’Agence de la biomédecine. Cependant, les refus de don atteignent un niveau inédit de 36,4 %, notamment en Île-de-France.
- L’Agence de la biomédecine souligne le paradoxe : 80 % des Français se disent favorables au don, mais leurs familles s’y opposent souvent, en raison notamment de croyances religieuses et d’idées reçues.
- Face aux préjugés et aux disparités régionales, l’Agence entend renforcer ses actions de sensibilisation. Malgré une baisse des décès en attente de greffe (-10 %), 852 patients sont morts faute de greffon en 2024.
Le nombre de greffes d’organes en France a franchi un cap en 2024, dépassant les niveaux d’avant la pandémie de Covid-19, selon le bilan annuel de l’Agence de la biomédecine présenté jeudi 13 février. Mais l’augmentation des refus de don de la part des familles constitue un frein préoccupant à cette avancée. Où en est réellement la situation ?
Une hausse des greffes, un espoir pour les patients
En France, troisième pays au monde pour les greffes derrière l’Espagne et les Pays-Bas, pas moins de 6.034 greffes ont été réalisées en 2024, soit une hausse de 7,1 % par rapport à l’année précédente. "On a dépassé les 5.903 transplantations de 2019, donc on a rattrapé la chute due au Covid, et on est en train de quasiment rattraper 2017, la meilleure année", a déclaré Marine Jeantet, directrice générale de l’Agence de la biomédecine, lors d’une conférence de presse.
Cette nette progression est attribuable à une augmentation des donneurs en état de mort encéphalique, ainsi qu’à une hausse des dons vivants, notamment pour les reins. Par organes, le rein est resté largement le plus transplanté, devant le foie, le cœur, les poumons ou encore le pancréas. En parallèle, le nombre de patients en attente d’une greffe continue de croître, bien que plus lentement. Aujourd’hui, 22.585 personnes espèrent recevoir un organe censé les sauver.
Une opposition croissante au don d’organes
Malgré ces progrès, le taux de refus atteint un niveau inédit : 36,4 % des familles s’opposent au prélèvement des organes d’un proche décédé, alors que la loi prévoit désormais que chaque individu est donneur, sauf inscription sur le registre des refus (1 % de la population). Cette opposition est particulièrement marquée en Île-de-France (53,6 %), tandis que la Bretagne reste la région la plus favorable au don (21 % de refus seulement).
Ce paradoxe est souligné par l’agence publique : huit Français sur dix disent vouloir donner leurs organes, mais une fois décédés, leur entourage s’y oppose. Parmi les raisons invoquées figurent des croyances religieuses (bien que les religions monothéistes n’interdisent pas le don), des idées reçues ou encore la difficulté émotionnelle de consentir au don pour un enfant ou un jeune adulte.
Lutter contre les idées reçues
L’Agence de la biomédecine entend intensifier ses actions de sensibilisation. En 2024, les inscriptions au registre des refus ont augmenté, en partie à cause de fausses informations diffusées sur les réseaux sociaux. Pour rassurer la population, elle rappelle que "les organes prélevés servent à des interventions thérapeutiques, pas à des recherches scientifiques", et que "les greffons sont attribués sur des critères uniquement médicaux". L'institution rappelle qu'il n'y a pas d'âge pour donner ses organes. En pratique, l’âge moyen des donneurs décédés prélevés, stable depuis dix ans, reste 58 ans.
Face à la disparité régionale des refus, l’Agence prévoit aussi de collaborer avec des sociologues afin de mieux comprendre les réticences et améliorer l’acceptation du don d’organes. Car derrière ces chiffres, ce sont des vies qui sont en jeu : en 2024, 852 patients sont décédés faute de greffon, soit une baisse de 10 % par rapport à 2023. Un chiffre encore bien trop élevé.