Entre les études et les résultats visibles dans les pays l’ayant rendu obligatoire depuis des années, l’efficacité du vaccin contre le papillomavirus (HPV) ne fait plus aucun doute. Cette vaccination, qui repose sur un schéma de deux doses entre 11 et 14 ans ou 3 doses entre 15 et 19 ans, réduit considérablement les risques d’infection chronique aux HPV, du cancer du col de l’utérus et des autres cancers HPV induits (ORL, pénis, anus… NDLR).
Pourtant, le vaccin peine à se faire une place dans les gestes santé des Français. L’Hexagone accuse un retard significatif en matière de vaccination contre le papillomavirus humain : la couverture vaccinale anti-HPV avec un schéma complet était seulement de 44,7 % chez les jeunes filles et de 15,8 % chez les garçons, âgés de 16 ans au 31 décembre 2023. Les professionnels de santé multiplient les études pour favoriser le rattrapage vaccinal.
Vaccin anti-HPV : sensibiliser les 3e pour renforcer l’adoption
L'Hôpital Foch et les Communautés Professionnelles Territoriales de Santé (CPTS) de Suresnes et de Rueil-Malmaison se sont interrogés sur l’âge du public cible. Est-ce que des interventions en santé sexuelle auprès des collégiens de 3ᵉ pourraient renforcer leur sensibilisation aux risques liés au HPV et favoriser le rattrapage vaccinal ? Les chercheurs ont ainsi interrogé 1.000 élèves de 3e. Les premiers éléments montrent que plus de 9 sur 10 n’ont pas encore eu de relations sexuelles. Par ailleurs, alors qu'ils font partie du cursus obligatoire, 25 % des sondés ont révélé n’avoir jamais bénéficié de cours d’éducation à la vie sexuelle et affective.
Un taux d'adhésion plus élevé après des interventions sur la santé sexuelle
Après avoir bénéficié des interventions en santé sexuelle prévues par l’étude, 70 % des collégiens ont indiqué avoir appris de nouvelles choses sur les risques liés aux maladies sexuellement transmissibles, dont le HPV. Trois quarts des élèves ont ajouté mieux percevoir les dangers liés à ce virus. Et près de 50 % envisagent de se faire vacciner et souhaitent en parler à leur entourage (parents/médecin). Ainsi, le taux d’adhésion est 2,6 fois plus élevé qu’avant intervention.
"Ces interventions ont montré qu'il est possible d'améliorer rapidement la compréhension des risques chez les adolescents. Par ailleurs, ils ne sont pas gênés par ces discussions et en ressortent souvent plus confiants", note Dr Zucman, infectiologue à l’Hôpital Foch et porteur du projet, dans un communiqué. Pour les chercheurs, il peut ainsi être intéressant de renforcer la sensibilisation à la vaccination contre le HPV auprès des élèves de 3e, car "ils sont plus proches de la puberté” que les 5e et “à 14 ans, deux injections de vaccins suffisent encore, contrairement à trois après 15 ans."
Cancer du col de l’utérus : et si une dose suffisait
L’autre piste de réflexion pour faciliter la protection contre les maladies HPV: proposer une vaccination à dose unique. L’OMS a validé l’utilisation d’un vaccin contre le papillomavirus humain (HPV) à administrer en dose unique appelé Cecolin®, en octobre dernier. Une annonce qui fait suite à des recommandations de l’organisation émises en 2022 où le groupe consultatif stratégique des experts en vaccination de l’OMS avait estimé qu'une seule dose de vaccin contre le papillomavirus permettait d'obtenir une protection solide contre les virus qui sont responsables du cancer de l'utérus.
Lors du 48e congrès national de la Société Française de Colposcopie et de Pathologie Cervico-Vaginale (SFCPCV) en janvier dernier, le Pr Geoffroy Canlorbe Chirurgien-gynécologue était revenu sur ce schéma vaccinal non disponible en France pour le moment : "en 2021, une étude en Inde avait été lancée pour comparer deux doses versus trois doses de vaccin. Elle avait été stoppée par le gouvernement indien parce qu'il y avait des craintes sur la recherche qui se sont révélées par la suite infondées”. L’équipe s’était ainsi retrouvée avec des patientes qui avaient reçu les trois doses, deux doses ou qu'une seule puisqu’elles n’avaient pas pu aller jusqu’au bout du schéma vaccinal.
Les scientifiques ont alors reformaté leurs travaux pour suivre cette cohorte particulière. Résultat : "les chercheurs ont montré qu’une vaccination à une, deux ou trois doses avait finalement une efficacité sur la réduction du portage de papillomavirus dans les quelques années suivantes, identique. Et cela, quelque soit le nombre de doses : entre 93 % et 95 %."
Une seule dose montre une réduction des HPV responsables de cancers
Une étude en Afrique du Sud, reposant aussi sur une seule dose, avait montré une réduction significative des HPV 16 et 18, ceux responsables des cancers.
Entre les données prometteuses et les recommandations des autorités sanitaires mondiales, 57 pays mettaient en œuvre le schéma en dose unique au 10 septembre 2024 (contre 37 en 2023).
Ce schéma en dose unique est surtout intéressant pour les pays ayant des difficultés d’approvisionnement et de déploiement des vaccins. Mais il pourrait peut-être aussi séduire certaines personnes réticentes face aux aiguilles ou face aux rendez-vous multiples. Néanmoins, ce dispositif présente un bémol, souligne le Professeur Geoffroy Canlorbe. Les études centrées sur une dose unique n’ont montré pour le moment que la diminution des virus HPV.
"Les études qui avaient permis de démontrer l’efficacité des vaccins contre les lésions cancéreuses et précancéreuses ont été faites avec deux ou trois doses", précise l’expert. Il faudrait ainsi des données supplémentaires confirmant l’efficacité d’une dose contre le cancer avant de pouvoir proposer ce schéma aux Français.
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