ACCUEIL > QUESTION D'ACTU > Urgences : pourquoi le temps d’attente a explosé en dix ans

Drees

Urgences : pourquoi le temps d’attente a explosé en dix ans

Par Stanislas Deve

Selon une enquête de la Drees, la moitié des patients passent en moyenne plus de trois heures aux urgences des hôpitaux, soit 45 minutes de plus qu’il y a dix ans. Les seniors sont particulièrement touchés.

Neydtstock / istock
Les urgences françaises sont plus que jamais sous tension : en 2023, la moitié des patients y a passé plus de trois heures, soit 45 minutes de plus qu’en 2013. Les seniors sont particulièrement touchés, 36 % restant plus de huit heures.
L’accès difficile aux soins de ville pousse aussi davantage de patients à s’y rendre. Malgré plus d’examens réalisés, les hospitalisations post-urgences ont chuté à 15 % contre 20 % en 2013, du fait de l’évolution des pratiques médicales mais aussi de la perte de 43.000 lits en dix ans.
Face à cette crise, les experts appellent à des mesures urgentes pour désengorger les urgences et améliorer la prise en charge.

Hausse du nombre de patients, allongement des durées de prise en charge, réduction du nombre de lits... Les services d’urgences en France sont plus que jamais pressurisés, et cela se répercute directement sur les malades. Une étude de la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees), publiée ce mercredi 19 mars, révèle qu’en dix ans, le temps passé aux urgences a augmenté de 45 minutes en moyenne.

Des temps d’attente encore plus longs pour les personnes âgées

L’enquête, menée en juin 2023 auprès de quelque 58.000 patients dans 719 points d’accueil d’urgences du pays, se veut "une photographie nationale des urgences sur 24 heures un jour moyen en semaine". En 2023, la moitié des patients a passé plus de trois heures aux urgences, contre 2h15 en 2013. Pour les patients qui, suite à leur passage, rentrent directement à domicile sans être hospitalisés, le temps médian est passé de 1h50 à 2h30. Quant aux personnes nécessitant une hospitalisation, elles ont attendu en moyenne 5h20, soit près de 1h30 de plus qu’il y a dix ans.

L’étude révèle que la situation est particulièrement alarmante pour les plus de 75 ans : 36 % d’entre eux restent plus de huit heures aux urgences, contre 24 % en 2013. Ce phénomène s’explique par des parcours de soins plus longs, nécessitant davantage d’examens et une hospitalisation plus fréquente. Or, la réduction du nombre de lits disponibles complique leur prise en charge.

Des services d’urgences saturés

La taille des établissements joue également un rôle : dans les petits services accueillant moins de 40 patients par jour, le temps d’attente médian est de deux heures. En revanche, dans les grands centres recevant plus de 120 patients par jour, il grimpe à 3h50. Un autre facteur préoccupant est l’accès aux soins de ville : en 2023, 21 % des patients ont déclaré se rendre aux urgences faute d’obtenir un rendez-vous médical ailleurs, contre 14 % en 2013. Cette tendance est aggravée par la diminution du nombre de médecins généralistes et les déserts médicaux.

Malgré l’augmentation des passages et des examens réalisés (IRM, scanners, analyses biologiques), la proportion de patients hospitalisés après leur passage aux urgences a chuté : 15 % en 2023, contre 20 % en 2013. Une baisse qui s’explique par l’évolution des pratiques médicales, mais aussi par la diminution des capacités d’hospitalisation des établissements. En dix ans, la France a perdu 43.000 lits, soit une réduction de 11 %, note la Drees. Par ailleurs, pour les patients nécessitant un lit d’hospitalisation, l’attente s’est considérablement allongée : si la moitié l’obtient en moins de 15 minutes, 10 % doivent patienter plus de 6h10, contre 3h45 il y a dix ans.

Quelles solutions ?

Face à cette crise, les experts appellent à des mesures urgentes pour désengorger les urgences, notamment une meilleure coordination entre l’hôpital et la médecine de ville. L’augmentation du nombre de lits et la modernisation des parcours de soins apparaissent également comme des leviers essentiels pour améliorer la prise en charge des patients et réduire les délais d’attente.