- Le mavoglurant, une molécule initialement développée pour une autre pathologie, semble prometteur pour traiter la dépendance à la cocaïne.
- Lors d’un essai clinique, ce médicament a permis de réduire significativement la consommation de cocaïne chez les participants, mais aussi la consommation d’alcool.
- Le mavoglurant pourrait devenir le tout premier traitement pharmacologique contre cette addiction, aujourd’hui sans solution médicamenteuse approuvée.
Et si un ancien médicament oublié pouvait changer la donne pour les patients souffrant d’addiction à la cocaïne, contre laquelle il n’existe à ce jour aucun traitement approuvé ? C’est en substance ce que suggère une équipe de scientifiques de Novartis Biomedical Research, un centre de recherche international, dans une étude publiée dans la revue Science Translational Medicine.
Une seconde vie pour un traitement oublié
Leurs travaux mettent en lumière l'efficacité du mavoglurant, une molécule initialement développée pour traiter le syndrome de l'X fragile, une maladie génétique rare entraînant une déficience mentale. Mais le mavoglurant n'avait pas répondu aux attentes. Novartis a alors exploré d'autres pistes : la dyskinésie induite par la L-Dopa chez les patients atteints de la maladie de Parkinson, les troubles obsessionnels compulsifs (TOC) ou encore les symptômes de sevrage tabagique. Mais c'est finalement dans le champ des addictions – à l’alcool et à la cocaïne – que le composé a montré un potentiel intéressant.
Lors d'un essai clinique, 68 participants diagnostiqués avec un trouble associé à l'usage de cocaïne ont reçu soit un placebo, soit une dose de mavoglurant deux fois par jour pendant plus de trois mois. Les consommations de chacun étaient surveillées grâce à des tests urinaires et capillaires, ainsi que des déclarations personnelles.
Des effets secondaires limités
Résultat, le "nouveau" médicament a entraîné "des réductions significatives" de la consommation de cocaïne par rapport au groupe placebo : les patients sous mavoglurant en ont fait usage en moyenne 12 jours sur trois mois, contre 20 jours pour les autres, selon un communiqué. Plus d’un quart des participants (27 %) ont même déclaré n’avoir pris aucune drogue durant la période de suivi. Ce n’est pas tout : une diminution de la consommation d'alcool a aussi été observée chez les volontaires sous mavoglurant, bien que non significative statistiquement. Quant aux effets secondaires, ils se sont limités à des "vertiges, nausées et maux de tête" jugés "gérables" par les participants.
Vers un premier médicament contre l’addiction à la cocaïne ?
Les scientifiques expliquent que le mavoglurant vient restaurer la sensibilité du cerveau à la dopamine, un neurotransmetteur au cœur du circuit de la récompense, lequel est totalement chamboulé par la consommation de cocaïne. Le médicament fonctionne en se liant et en inhibant un récepteur dans le cerveau qui rend les cellules moins sensibles à la dopamine.
À ce jour, aucune molécule n'a encore été homologuée pour traiter la dépendance à la cocaïne. Les approches actuelles reposent essentiellement sur des accompagnements psychosociaux comme la thérapie cognitive et comportementale (TCC), avec une efficacité souvent jugée insuffisante. Si les prochaines phases cliniques confirment les résultats obtenus, le mavoglurant pourrait donc devenir le tout premier traitement pharmacologique spécifiquement destiné à cette addiction, qui tend à augmenter à l’échelle mondiale.
Pour rappel, quelque 1,1 million de Français âgés de 11 à 75 ans affirment avoir déjà consommé de la cocaïne au moins une fois au cours de l’année, selon les derniers chiffres de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT).