Le débat sur la fin de vie est loin d'être fini. C'est en substance ce qu'ont voulu dire ce lundi les membres de la famille de Vincent Lambert (1), favorables à l'arrêt des traitements qui maintiennent en vie artificiellement ce jeune tétraplégique de 37 ans. Pour eux la ministre de la Santé, Marisol Touraine doit clairement, et au plus vite, indiquer son choix concernant ce dossier épineux sur la fin de vie. Un appel du pied en forme de tribune dans le quotidien Le Monde.
L'appel au plus hautes instances sanitaires
Le 16 janvier 2014, le tribunal admnistratif de Châlons-en-Champagne a ordonné aux médecins du CHU de Reims de ne pas arrêter la nutrition et l'hydratation artificielles de Vincent Lambert, en état de conscience minimale depuis 5 ans à la suite d'un accident de moto. Depuis cette décision, aucune réaction des membres de la famille favorables à un arrêt des traitements ne s'était fait entendre. Alors, pour briser ce silence, ces derniers écrivent dans Le Monde : « Comment a-t-on pu en arriver à un point où les membres d'une famille qui ont voulu soutenir le CHU dans cette épreuve judiciaire difficile en sont réduits, au choix, à regarder impuissants l'acharnement sur un être cher en attendant qu'une nouvelle loi soit votée pour le soulager ou à demander eux-mêmes à ce qu'une décision médicale soit respectée auprès du Conseil d'État ? »
Pour cette raison, ces signataires demandent donc à la ministre de la Santé, Marisol Touraine, de prendre clairement position en faveur d'un appel de la décision du tribunal administratif : « Cette tribune n'a d'autre but que de demander instamment à Madame Marisol Touraine, à toutes les institutions compétentes, (...), de se prononcer par écrit, clairement, et de façon urgente, auprès de Monsieur le Directeur Général du CHU de Reims en faveur d'un recours. »
La loi Leonetti critiquée à nouveau
Selon eux, l'absence de prise de position claire de la part des autorités est dommageable pour tous ces patients en état de conscience minimale. « Vincent – mais aussi toutes les personnes pouvant un jour se retrouver dans sa situation – risque fort de devoir continuer à vivre dans la souffrance et le déni de sa volonté clairement exprimée par oral : Vincent n'anticipait pas cette situation au point d'écrire ses directives, comme 98 % de la population française », notent-ils.
D'ailleurs, au passage, les signataires égratignent une nouvelle fois la loi Leonetti sur la fin de vie, qui semble selon eux, « inapplicable. » « Elle autorise une injection létale de calmants (et seulement de calmants) sans intention de donner la mort (sic). Elle demande à ce que soient prévenus (y compris oralement) les membres d'une famille, sans définir ce qu'est la famille, et à défaut, un proche, » rajoutent-ils.
Quoi qu'il en soit, il reste maintenant jusqu'à la date de notification de l'ordonnance, aux parties qui le souhaitent, pour déposer un recours devant le Conseil d'Etat. Soit jusqu'au 3 février pour le CHU de Reims, au 7 février pour François Lambert, le neveu, et au 10 février pour Rachel, l'épouse de Vincent Lambert. Contacté par pourquoidocteur, Me Francis Fossier, avocat de Rachel, n'a pas souhaité communiquer leur décision de faire ou pas appel.
Pour sa part, Me Bruno Lorit, avocat de François Lambert lui aussi favorable à l'arrêt des traitements sur son oncle, a indiqué qu'il attendait la décision du CHU de Reims. Pour lui, « si l'hôpital et donc les médecins choisissent de faire appel, il y a de fortes chances que nous y allons aussi. » Fin du suspense dans quelques jours.
(1) Marie Lambert (sœur de Vincent Lambert), Joseph Lambert (frère de Vincent Lambert), Marie Geneviève Lambert (demi-sœur de Vincent Lambert), François Lambert (neveu de Vincent Lambert), Guy Noël Philippon (demi-frère de Vincent Lambert) et Frédéric Philippon (demi-frère de Vincent Lambert).
Hormis François Lambert, aucun des signataires n'a pris part à la poursuite judiciaire. Ils s'expriment pour la première fois dans cette affaire.