Alcool, tabac, cannabis, les niveaux de consommation de ces substances psychoactives chez les adolescents restent élevés en France. C'est le premier constat de l'Inserm, qui à la demande de la Mildt (1), publie ce jeudi son bilan des connaissances scientifiques sur la vulnérabilité des adolescents (âgés de 10 à 18 ans) à l'usage de ces produits. L'analyse de ces experts est issue des principales enquêtes de consommations en France et de la littérature scientifique internationale des dix dernières années. Et les données étudiées préoccupent les experts, surtout que l'adolescence correspond à une période de grande vulnérabilité, notamment pour le cerveau de ces jeunes.
L'alcool, première substance psychoactive expérimentée par les jeunes
En France, l'alcool est la 1ère substance psychoactive consommée en termes de niveau d'expérimentation, d'usage occasionnel et de précocité d'expérimentation. Ainsi, en 2011, à la fin de l'adolescence, l'expérimentation de boissons alcoolisées concerne 91 % des garçons et des filles. Parmi les élèves âgés de 11 ans, 58 % ont déclaré en 2010 avoir déjà expérimenté une boisson alcoolisée.
Concernant les usages réguliers d'alcool (au moins dix fois dans le mois), ils apparaissent dès la fin du collège : en 2010, 7 % des élèves de 3ème ont déclaré avoir consommé une boisson alcoolisée au moins 10 fois dans le mois précédent l'enquête. En 2011, ces usages réguliers d'alcool concernaient 15 % des garçons et 6 % des filles de 17 ans.
Enfin, un dernier point inquiète les experts. Il s'agit de l'ivresse alcoolique qui est aujourd'hui une expérience vécue par certains dès le collège. Ces alcoolisations ponctuelles importantes (API) au cours du mois sont en hausse continue : 46 % en 2005, 53 % en 2011.
S'agissant des dommages sur la santé, et donc de la vulnérabilité des adolescents face à l'alcool, les experts de l'Inserm rappellent que comparé à l'adulte, la consommation d'alcool chez l'ado, et notamment les API, exerce des effets neurotoxiques plus prononcés sur le cerveau, aussi bien au niveau structural (génération de nouveaux neurones) que fonctionnel (apprentissage, mémoire). Par ailleurs, l'Inserm s'inquiète de l'association des boissons énergisantes et alcoolisées régulièrement faite par les ados. Elle augmente, selon eux, les effets de l'alcool et notamment le rsique de rapports sexuels non protégés. Enfin, ces derniers évoquent "le lien éventuel entre la consommation de ces « energydrink » associées à l'alcool et la survenue ultérieure d'une dépendance à l'alcool".
Europe : les ados français sont de gros fumeurs
En 2011, en France, plus de 2 jeunes sur 3 âgés de 17 ans (68 %) ont expérimenté le tabac. « C'est plus que chez nos voisins européens », note l'Inserm. La tabac reste ainsi, dans l'Hexagone, le 1er produit psychoactif consommé quotidiennement à l'adolescence. Selon les données de 2011, on observe des usages quotidiens dès le collège (8 % parmi les élèves de 4ème et 16 % parmi ceux de 3ème). De plus, il est observé une légère augmentation du tabagisme quotidien entre 2008 et 2011.
Et cette conduite n'est pas sans risque. Outre le risque élevé de dépendance, le tabac entraîne de nombreuses conséquences sanitaires à long terme bien connues (pathologies respiratoires, cardiovasculaires, cancers...)
Cannabis : une conso précoce et régulière accroît les risques
En France, le cannabis est le 1er produit psychoactif illicite consommé à l'adolescence. Les premières expérimentations, encore très rares à l'entrée au collège, sont observées dès les dernières années de collège. Pour les usages réguliers, ils concernent 2 % des élèves de 3ème en 2010-2011, 6 % des élèves de seconde, et 7 % des élèves de terminale.
Parmi ces ados, l'Inserm note qu'à l'âge de 17 ans, 5 % présenteraient un risque d'usage problématique, voir de dépendance. Davantage chez les garçons que chez les filles. Mais avec les mêmes risques pour la santé.
La consommation régulière de cannabis provoque en effet des dommages à long terme qui peuvent altérer les résultats scolaires, et les relations interpersonnelles. Ces troubles cognitifs observés à long terme sont corrélés à la dose, la fréquence, la durée d'exposition, et à l'âge de la 1ère consommation de cannabis.
Enfin, ces experts indiquent que le cannabis peut également précipiter la survenue de troubles psychiatriques.
Les recommandations des experts
Les experts soulignent qu'il faut notamment « prévenir l'initiation ». Ils soulignent ainsi l'importance du développement des compétences psychosociales des adolescents. Pour eux, « cela pourrait s'inscrire dans des activités de groupe, notamment en milieu scolaire, et être en adéquation avec l'entrée dans la consommation des différents produits (10-12 ans par exemple pour le tabac). »
Enfin, parmi les mesures efficaces, ces experts préconisent de mieux encadrer la vente du tabac et de l'alcool. Ils souhaitent donc que l'achat de ces produits soit systématiquement assorti de la présentation d'un document officiel indiquant l'âge de l'acheteur.
(1) Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie