Aller chez le médecin généraliste sans avancer les frais, c'est l'avantage dont pourraient bientôt bénéficier tous les Français, grâce à la promesse de la ministre de la Santé, Marisol Touraine, qui a fait de la généralisation du tiers payant la clé de voûte de sa stratégie nationale de santé. Afin d'avancer sur le dossier de cette mesure annoncée pour 2017, la ministre a confié une mission d’évaluation à l’Inspection Générale des Affaires sociales (IGAS) pour la mise en place d’un tiers payant intégral, c’est-à-dire « concernant le paiement du médecin par l’assurance maladie obligatoire (AMO) et les assurances maladie complémentaires (AMC) ». Rédigées par Etienne Marie et Juliette Roger, les conclusions de ce rapport de 133 pages publié en fin de semaine sont favorables au dispositif du tiers-payant, même si certains points nécessitent d’être éclaircis. « Car la tache n'est pas des plus faciles », confie Philippe Besset, vice-président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), contacté par pourquoidocteur. Pour lui, le pari de 2017 fait par la ministre est "audacieux".
Le tiers payant en pharmacie a 20 ans
Le tiers-payant généralisé en pharmacie existe depuis plus de 20 ans. Il s'est déployé sur l'ensemble du territoire, département par département, et pharmacie par pharmacie. Selon Philippe Besset, cela a pris "cinq à sept ans" pour le mettre en place. Au début, les pharmaciens ont commencé par le tiers payant dit "légal". C'est-à-dire pour les patients qui sont en couverture maladie universelle (CMU), en affection longue durée (ALD), ou encore en invalidité.
Et ensuite, via les syndicats professionnels, les pharmaciens ont développé un système conventionnel. D'abord avec l'Assurance maladie, puis avec les complémentaires privées. Aujourd'hui, 100 % des pharmacies y ont adhéré.
Ecoutez Philippe Besset, vice-président de la FSPF : « Est-ce que cela a été simple ? Non. Ca s'est fait étape par étape. De façon progressive...»
Une dispositif informatique aidé par l'arrivée de l'Internet
La mécanique du dispositif de tiers-payant en pharmacie repose essentiellement sur de l'informatique. En fait, lorsque le patient se rend chez le pharmacien, il doit justifier de ses droits à l'Assurance maladie. Cela grâce à deux documents qu'il fournit au pharmacien : sa carte vitale, et un autre document attestant qu'il est bien affilié à une complémentaire santé. Ensuite, le pharmacien enregiste un certain nombre de codes dans son informatique officinal.
Avec la saisie de ces codes, le pharmacien crée une facture pour les produits. Mais au lieu de faire payer le patient, cette facture est envoyée via un flux internet au concentrateur technique. Ce dernier s'occupe alors de dispatcher cette facture entre l'Assurance maladie obligatoire et la complémentaite santé du patient. Par la suite, chaque partie reçoit sa propre facture. Et chacune des deux parties règle sa partie au pharmacien.
Ecoutez Philippe Besset, vice-président de la FSPF : « Au lieu de faire payer le patient, la facture est envoyée à un concentrateur technique. Ce dernier s'occupe alors de dispatcher la facture...»
Une mesure pour soulager le pouvoir d'achat des patients
Enfin, Philippe Besset reconnaît que même si mettre en place ce tiers-payant a été "long et difficile", cela était "indispensable". Car les médicaments sont souvent trop coûteux pour les patients au faible pouvoir d'achat. Ces derniers ne disposent pas toujours de l'argent pour régler la facture en officine.
« Alors, même si les débuts ont été semés d'embûches nous ne regrettons pas d'avoir fait ce travail. Reste aujourd'hui aux médecins généralistes à débuter ce travail », lâche le pharmacien. Néanmoins, ces derniers seront davantage aidés par l'outil informatique qui s'est largement développé au cours de ces dernières années. De leurs côtés, les pharmaciens n'en étaient qu'aux balbutiements de l'Internet. « Pendant un grand nombre d'années, nous étions les meilleurs clients de France Télécom pour l'achat de modems ! », conclut Philippe Besset.
Ecoutez Philippe Besset, vice-président de la FSPF : « Dans une pharmacie, la facture s'élève parfois à une centaine d'euros. C'était un véritable problème pour l'accès aux soins...»