Les probiotiques peuvent-ils soulager la colique du nourrisson ? C'est une piste explorée par bon nombre de chercheurs depuis quelques années pour apporter une solution aux parents souvent confrontés aux pleurs du nouveau-né à cause des diarrhées infantiles. Pourtant, selon une étude randomisée publiée ce mardi dans le British Medical Journal (BMJ), le probiotique de référence administré serait inefficace pour soulager ces symptômes. Une mauvaise nouvelle pour les 20 % de nourrissons qui en souffrent.
127 enfants de moins de 3 mois inclus
Ces diarrhées sont définies par les critères de Wessel par des pleurs ou des complaintes de trois heures ou plus pendant au moins trois jours par semaine pendant trois semaines chez les enfants de moins de 3 mois. Si ces coliques se résolvent en général à 3 ou 4 mois, elles constituent un facteur de risque documenté de dépression maternelle, d'interruption prématurée de l'allaitement maternel et de syndrome de bébé secoué. Pour réduire ces risques, malgré un niveau de preuves scientifiques modeste, le recours aux probiotiques s'est largement étendu à travers le monde.
Dans ce contexte, Valerie Sung du Royal Children's Hospital à Parkville (Australie) et ses collègues ont estimé qu'il était urgent de disposer de preuves rigoureuses à ce sujet. Ils ont ainsi cherché à évaluer si l'administration quotidienne de L. reuteri (DSM 17938) était bénéfique pour les coliques de nourrissons de 3 mois, qu'il soient allaités ou nourris avec du lait infantile.
Ainsi, entre août 2011 et août 2012, ils ont inclus 127 enfants de moins de 3 mois souffrant de diarrhées et pleurant ou manifestant leur inconfort trois heures ou plus pendant au moins trois jours sur sept. Les enfants ont été randomisés entre le probiotique et un placebo pendant un mois. Et les résultats sont sans appel pour l'équipe de chercheurs.
Pas d'impact positif sur les symptômes du nourisson
Globalement, à un mois, les enfants du groupe probiotique avaient manifesté leur mécontentement ou pleuré en moyenne 49 minutes de plus par jour, mais les résultats n'étaient pas statistiquement significatifs, précise l'équipe australienne.
Pour tous les autres critères d'évaluation choisis par les investigateurs, les deux groupes étaient similaires et à six mois, il n'y avait plus de différence entre les deux groupes. Pour ces scientifiques, l'administration de L. reuteri n'a pas eu d'impact « positif » sur les symptômes des nourrissons, ni sur la santé maternelle. De plus, ce traitement n'a modifié ni la diversité microbienne de la flore des enfants, ni le niveau de colonisation d'Eschericha coli, rajoutent-ils.
Pour William Bennett, gastro-pédiatre à l'université Indiana à Indianapolis qui a participé aux travaux, cette étude est « la plus définitive et la mieux conçue jusqu'à présent. » Pour cette raison, il invite les médecins à se poser la question de la pertinence du traitement des coliques de l'enfant.
Les essais préventifs non concluants
Au vu de ces nouvelles données, le bénéfice réel des probiotiques reste difficile à affirmer scientifiquement. Surtout que les résultats d'une précedent étude étaient eux aussi mitigés. Publiée dans la revue JAMA Pediatrics en octobre 2013, la moitié des essais suggèrait que les probiotiques soulagent les nourrissons. Sur les 5 essais « traitement », 3 concluaient que le L reuteri traite la colique du nourrisson chez les bébés nourris au sein. La durée moyenne des pleurs était aussi réduite d’une heure. Pourtant, là encore, l'efficacité des probiotiques était quasi-nulle chez les enfants nourris au biberon. Quant aux essais préventifs, ils n’avaient pas démontré d'impact sur l’état des nouveau-nés.