Alors que Vincent Lambert a été transféré il y a quelques heures du CHU de Reims à la Pitié-Salpêtrière (Paris) pour subir toute une batterie de tests neurologiques, une nouvelle affaire vient agiter le débat sur la fin de vie. Le tribunal administratif de Strasbourg a en effet autorisé ce mardi les médecins du CHU de la capitale alsacienne à tenter de réveiller un patient plongé dans le coma. Cela malgré l'opposition de son épouse qui craint une « obstination déraisonnable. »
Les médecins envisagent aussi l'arrêt des soins
Dans cette histoire singulière, mais semblable à tant d'autres, le patient en question est plongé dans le coma depuis juillet 2013 suite à un grave accident. Pour les juges administratifs, les « soins d'éveil » sur le patient, envisagés par le service de neurochirurgie du CHU de Strasbourg, « ne peuvent pas être qualifiés d'inhumains ou dégradants. » Pourtant, en prenant cette décision, la justice donne tort à l'épouse de cette homme qui l'avait saisi en urgence pour faire cesser ces soins.
De plus, les juges ont précisé que tenter des soins d'éveil ne remettait pas en cause la mise en œuvre éventuelle de la loi Leonetti de 2005 sur l'arrêt des traitements visant à un maintien artificiel de la vie. L'équipe médicale a d'ailleurs reconnu que « si la situation devait évoluer défavorablement, toutes les options resteraient ouvertes, même un arrêt des soins. »
Une famille divisée
Dans l'attente, le patient a été transféré le 2 avril de l'hôpital de Colmar à celui de Strasbourg car les équipes médicales considèrent qu'il peut être tenté de le réveiller. Elles prétendent qu'une amélioration notable de son état peut être envisagée, « puisqu'il répond à certaines stimulations de son environnement et qu'il peut ressentir des émotions. »
Et comme dans l'affaire Vincent Lambert, la famille est encore ici divisée. Certains proches du malade pensent en effet que la gravité des lésions cérébrales pourrait engendrer un handicap probablement inacceptable pour le malade.
L'absence cruelle des directives anticipées
En outre, l'épouse du mari a fait valoir, depuis le début, que son mari lui avait fait part de sa volonté « de ne pas se trouver confronté un jour à un état grabataire. » Elle redoute aujourd'hui « une obstination déraisonnable et un risque de maintien artificiel en vie irréversible » qui amènerait son mari « vers un état de conscience minimale sans dignité », explique la juridiction.
Une fois de plus, les directives anticipées manquent cruellement dans cette affaire. Comme la plupart des Français, le patient dont il est question n'a en effet pas rédigé de directives anticipées, stipulant ce qu'il souhaitait ou ne souhaitait pas subir dans l'éventualité où il ne serait plus un jour en état de l'exprimer. Une attitude fréquente puisque 98 % des Français ne laissent pas de document écrit de ce type à leurs proches ou à leur médecin. Il est pourtant possible de rédiger ces directives dès sa majorité.
Enfin, suite à cette décision de justice, l'épouse a demandé au tribunal alsacien d'ordonner une expertise médicale pour lever les incertitudes. D'après une porte-parole de la juridiction, cette expertise devrait être prochainement ordonnée, car les équipes médicales, à Colmar comme à Strasbourg, ne s'y opposent pas.