La connaissance du cerveau progresse encore. Deux équipes internationales sont parvenues à identifier une maladie neurodégénérative extrêmement rare, qui touche surtout les populations de l’Est de la Turquie. Ce 24 avril, dans la revue Cell, deux études détaillent cette maladie qui cause une dégénérescence du système nerveux central et périphérique. Tous les patients atteints auraient un ancêtre commun, né il y a 16 générations sous l’Empire Ottoman.
Une protéine clé
La maladie en question est causée par une mutation sur le gène CLP1, qui produit une protéine clé dans la fabrication de molécules qui envoient les acides aminés vers des sous-cellules qui les transforment en protéines. Les effets de sa dysfonction sont dévastateurs : elle se développe dès l’enfance et entraîne de lourds handicaps moteur et mental. La première étude a pisté la mutation chez 4 familles différentes mais ayant le même ancêtre dans leur arbre généalogique. L’autre étude a mis en évidence la même mutation chez 5 familles supplémentaires. Au total, pas moins de 4 000 familles atteintes de troubles de ce type ont été analysées. Et une simple analyse clinique ne suffit pas pour dépister la maladie.
Connaître les mécanismes d’action
« Ce qui est particulièrement frappant, quand on observe ces deux études, c’est que nous n’aurions pas pu distinguer cette maladie d’autres troubles similaires en se basant uniquement sur l’analyse des symptômes et le tableau clinique », explique le Dr Joseph Gleeson, de l’université de Californie à San Diego (Etats-Unis) et co-auteur d’une étude. « Mais dès que nous avons repéré le gène chez toutes les familles, des caractéristiques communes ont émergé. »
La compréhension du fonctionnement de cette maladie très rare devrait permettre de mieux appréhender celui de troubles plus fréquents, selon les chercheurs. « Plus on en apprend sur les mécanismes de base des formes rares de neuro-dégénérescence, plus on peut obtenir de nouvelles informations sur des affections plus communes, comme la maladie d’Alzheimer ou la maladie de Charcot, » analyse Murat Gunel, de l’université de Yale (Etats-Unis) et co-auteur de l’étude. Josef Penninger, qui a mené l’étude depuis l’Académie autrichienne des sciences, partage cet avis : « Connaître les voies fondamentales qui régulent la dégénérescence des neurones devrait nous permettre de définir celles de la maladie de Charcot par exemple. »