Les hépatites tuent 4 000 patients chaque année, mais leur prise en charge progresse. Dans un rapport rendu public ce 19 mai, l’Agence de Recherche sur le Sida et les hépatites virales (ANRS) et l’Association française pour l’étude du foie (AFEF) livrent un bilan sur la prise en charge des quelques 50 000 personnes infectées par le virus de l’hépatite B ou C.
Des infections sous contrôle
Les hépatites virales sont en chute et de mieux en mieux traitées. Ce rapport, coordonné par le Pr Daniel Dhumeaux, souligne les progrès frappants des molécules disponibles. Elles ont atteint une efficacité telle que le taux de guérison des infections par le virus de l’hépatite C atteint 90%. Le traitement est court (3 mois) et accompagné de peu d’effets indésirables. Les traitements de l’hépatite B, bien que moins avancés et nécessaires tout au long de la vie, peuvent désormais contrôler l’infection. Dans les deux cas, les médicaments permettent de réduire le risque d’évolution vers une cirrhose ou un carcinome hépatocellulaire, qui accroissent la mortalité.
Au vu de ces réussites, deux objectifs doivent être fixés : traiter l’ensemble des malades atteints d’hépatite C, et développer la recherche de médicaments permettant de guérir l’hépatite B sur une durée plus courte.
Une personne infectée sur deux ne le sait pas
Prévention et dépistage sont pourtant plus nécessaires que jamais. Le rapport souligne les inégalités dans l’accès des populations vulnérables à un suivi. Usagers de drogues, migrants issus de zones endémiques ou encore détenus sont aussi les moins vaccinés et les moins dépistés. Cela constitue d’ailleurs le principal point noir du rapport : la moitié des personnes infectées par le virus de l’hépatite B ou C s’ignorent.
Un retard largement dû au manque de vaccination. Les personnes à risque élevé (soignants, multipartenaires, usagers de drogues…) se voient proposer une immunisation contre l’hépatite B. Dans les faits, moins d’un consommateur de drogue sur deux est vacciné, tout comme 60% des hommes à relation sexuelle avec des hommes (HSH) et 88% des médecins généralistes. D’ailleurs, le taux d’immunisation a chuté entre 2000 et 2009. La recommandation de l'ANRS est donc claire : "Il faut profiter de tout contact avec un médecin ou une structure d'accueil pour proposer une vaccination aux enfants, adolescents et personnes exposées." Et les experts enfoncent le clou en rappelant que les craintes concernant la vaccination contre l'hépatite ne sont pas justifiées.
Dépister tous les hommes entre 18 et 60 ans
Côté dépistage, la France ne fait pas tellement mieux, puisqu’une personne infectée par l’hépatite C ignore son statut sérologique. Prise en charge tôt, une hépatite peut pourtant être contrôlée rapidement, ce qui réduit le risque de contamination et de complications. C’est pourquoi l’ANRS et l’AFEF encouragent vivement la mise en place de dépistages de proximité, comme les tests rapides à orientation diagnostique (TROD). Les auteurs du rapport recommandent en fait d'élargir le dépistage aux hommes âgés de 18 à 60 ans et aux femmes enceintes dès la première consultation prénatale.
Enfin, l'Agence nationale de recherche sur le sida et les hépatites ainsi que l'association française pour l'étude du foie ne se contentent d'émettre des recommandations purement médicales puisque les inégalités sociales expliquent beaucoup des contaminations. Les auteurs du rapport plaident donc clairement pour une amélioration de la couverture médicale complémentaire de santé, du droit de séjour pour raisons de soins, etc. Faute de mesures sociales, les progrès extraordinaires des traitements pourraient bien être ternis.