La quantité de médicaments en rupture de stock ne cesse d'augmenter. Les situations de ruptures sont difficiles à accepter par les patients, les médecins et les pharmaciens car une interruption de traitement, même très momentanée, peut avoir des incidences graves sur la santé d'un malade.
Une enquête a été menée par les entreprises du médicament (Leem) - entre septembre 2012 et octobre 2013 - auprès de 90 laboratoires pharmaceutiques ayant effectué au moins une déclaration de rupture auprès de l'ANSM. Même si 95% des médicaments vendus en pharmacie sont disponibles le jour même en France, les ruptures et les risques de rupture en produits indispensables sont en augmentation ces dernières années. Selon l'ANSM, elles étaient de 44 en 2008, et de septembre 2012 à octobre 2013, 324 ruptures de stock et 103 risques de rupture en produits indispensables ont été enregistrées. L'enquête du Leem révèle que la durée maximale de la rupture est de 398 jours et la durée moyenne de 94.
Des matières premières qui viennent de très loin
Si ce phénomène prend de l'ampleur, c'est pour des raisons économiques. En effet, aujourd'hui, 60 à 80% des matières premières à usage pharmaceutique sont fabriquées hors de l'Union Européenne alors qu'elle n'était que de 20% il y a 30 ans. La multiplication et l'éloignement des différents sites industriels d'extraction et de substance active, de fabrication, de conditionnement rendent les contrôles plus complexes et accentuent les risques pesant sur la chaîne de fabrication. Ce contexte économique favorise donc les ruptures d'approvisionnement. Ensuite, une défaillance d'un ou plusieurs maillons de la chaîne de distribution (fabricants, dépositaires, grossistes...) vont causer la rupture de stock.
Principales causes de ruptures
Les causes de ruptures de stock sont nombreuses. Selon l'enquête du Leem, il s'agit dans 33% des cas d'un problème dans la production (technique, qualité, analyse), dans 28% des cas d'une augmentation des ventes, et donc des capacités industrielles restreintes, dans 16% des cas d'un problème d'approvisionnement (en matière première ou excipient). Les autres raisons sont, entre autres, les ruptures de stock d'un concurrent, l'arrêt de la commercialisation et l'indisponibilité d'articles de conditionnement.
L'exigence du « zéro défaut » entre aussi en compte, car un défaut de qualité dans un lot de plusieurs centaines de milliers de boites peut paralyser la chaîne de production du médicament.
Un phénomène mondial
Les ruptures déclarées à l'ANSM concernent à hauteur de 28% des médicaments dits indispensables, et à 72% des médicaments moins indispensables. Selon l'enquête du Leem, toutes les classes de médicaments sont potentiellement touchées, mais les plus touchés sont les traitements hormonaux, les anticancéreux, les traitements du système nerveux central et les anti-infectueux. Ce phénomène semble être un peu plus important pour les médicaments dispensés à l'hôpital que pour ceux dispensés en ville.
Le phénomène de rupture de médicaments est mondial, il n'épargne aucun pays. Selon une enquête présentée au congrès de la Société américaine d’oncologie clinique (ASCO) réalisée auprès de 250 oncologistes et hématologistes américains, 80% de ces médecins ont dû faire face à des ruptures entre mars et septembre 2012.