Que deviennent les malades victimes d’un cancer deux ans après leur diagnostic ? C’est ce que viennent de tenter de préciser l'Institut national du cancer (INCa) et l'Inserm lors d’une grande enquête baptisée VICAN2. En effet, ces deux institutions ont interrogé en 2012 plus de 4300 malades sur leur vie quotidienne, professionnelle ou même intime pendant et surtout après la maladie. Résultat, si cette large étude met en évidence de façon criante le poids des inégalités dans toute la trajectoire des patients atteints du cancer, elle met également en avant l’impact très fort de cette pathologie sur le revenu du ménage. Ainsi, si au moment du diagnostic de cancer des personnes interrogées, c’est à dire en 2010, leur situation financière était similaire à celle de la population générale, il est clair que deux ans plus tard, la maladie a fait des dégâts. Alors qu’en 2010 par exemple, 20 % des individus avec un cancer étaient considérés comme pauvres, en 2012, soit deux années après leur diagnostic, leur proportion a augmenté, puisque 25,1% des personnes enquêtées se trouvaient en dessous du seuil de pauvreté.
24% des malades assuraient la totalité des revenus avant le cancer
Pour mesurer l’impact du cancer sur les revenus des patients et de leur ménage, les investigateurs de cette enquête se sont tout d’abord intéressés aux différentes sources de revenu des enquêtés. Sans surprise, il ressort que la source principale de revenu est la pension de retraite : 53,8 % en 2010 et 58,6 % en 2012. Un constat normal car le cancer est plus fréquent dans les tranches d’âge les plus âgées.
En revanche, la proportion de personnes dont la source principale de revenu est leur salaire ou leur revenu d’activité diminue entre le diagnostic et le moment de l’enquête, passant de 35,3 % à 28,1 % en deux années. C’est évidemment dans cette population que l’impact du cancer sur les ressources est potentiellement plus important. Mais pour avoir une idée plus précise de l’impact financier de la maladie, l’étude a analysé la part exacte des revenus des personnes malades dans le revenu du ménage. Résultat, 34% des actifs en emploi au moment du diagnostic contribuaient fortement aux revenus de leur ménage et 24% assuraient la totalité des revenus. Un dernier groupe de population très vulnérable financièrement face au cancer, composé essentiellement de personnes célibataires, divorcées, séparées ou veuves.
La perte d’emploi, pas le seul facteur de baisse des revenus
Mais l’impact de la survenue du cancer sur la situation financière des ménages peut prendre plusieurs formes et intensités selon la situation professionnelle de la personne diagnostiquée. Une interruption de long terme du travail n’a pas les mêmes effets qu’un emploi occupé en continu même avec des modifications du revenu dues par exemple à la modulation du temps de travail. De plus, des différences significatives sont observées dans l’enquête quant à l’impact du niveau d’études, la catégorie socioprofessionnelle, le type de contrat et la taille de l’entreprise.
Ainsi dans le détail, les personnes qui risquent le plus une perte de revenu après le diagnostic de cancer ont un niveau d’études inférieur au bac (risque de 31 % plus important que celui des personnes plus diplômées), ont un métier d’exécution (+ 31 %), sont sous CDD (+ 43 % comparativement au CDI), travaillent dans une PME (risque 27 % plus important de perte de revenu que celui associé au travail dans les micro-entreprises ou de grandes entreprises). Enfin, moins le cancer est sévère, plus faible est le risque de perte de revenu. Au final, VICAN2 revèle donc que la moitié des ménages touchés par le cancer situe leur perte de ressources entre 250 euros et 1 000 euros par mois.