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Traitement de l'alcoolisme

Baclofène : qui pourra bénéficier du remboursement ?

Par la rédaction

Les médecins ont l'autorisation de prescrire le baclofène depuis 3 mois, les patients ont aujourd'hui le droit de se faire rembourser leur traitement contre l'alcoolodépendance. Mais à certaines conditions...

SERGE POUZET/SIPA

C'est officiel, le baclofène est désormais un médicament remboursable dans l'alcoolodépendance. Un arrêté paru au JO aujourd’hui précise que ce décontractant musculaire accède au remboursement en tant que traitement de la dépendance à l’alcool durant les 3 ans de validité de la RTU accordée au baclofène.

Ce feu vert tant attendu ne signifie pas que toutes les personnes alcoolodépendantes vont pouvoir bénéficier de ce remboursement. En effet, si l’Agence nationale de sécurité du médicament a autorisé vendredi 14 mars l’utilisation de ce décontractant musculaire pour couper l’envie de boire aux malades dépendants à l’alcool, sans attendre les résultats des deux essais cliniques en cours en France sur le baclofène, des conditions très précises de prescription ont été définies. L’ANSM précise tout d'abord que « le baclofène pourra être prescrit après échec des autres traitements disponibles chez les patients alcoolo-dépendants dans les deux indications suivantes : aide au maintien de l’abstinence après sevrage chez des patients dépendants à l’alcool et réduction majeure de la consommation d’alcool jusqu’au niveau faible de consommation chez des patients alcoolo-dépendants à haut risque ».

Contre-indiqués pour certains malades
Par ailleurs, l’Agence a joué la sécurité en contre-indiquant le baclofène pour toutes les personnes présentant des troubles neurologiques ou psychiatriques graves (épilepsie non contrôlée, schizophrénie, troubles bipolaires, dépression sévère) ou une insuffisance rénale ou hépatique sévère. Des contre-indications qui ne font pas l'unanimité. Les psychiatres estiment que les patients psy, malgré la maladie, sont comme les autres. Une dizaine de collèges et syndicats de psychiatres publiaient un communiqué en mars dans lequel ils affirmaient : « L'expérience montre que les patients pour lesquels l'ANSM contre-indique le baclofène y sont sensibles et que ce traitement, malgré les effets secondaires psychiques qu'il peut entraîner, peut leur être fort utile, à condition que toutes les précautions d'utilisation soient observées et qu'une prise en charge étroite par un spécialiste en psychiatrie soit assurée. En l'état, il s'agirait, pour des cas graves, d'une perte de chance apparaissant comme une discrimination vis-à-vis de la maladie mentale ».


Un dosage très progressif

En matière de doses également, l’ANSM se veut prudente. « La posologie quotidienne initiale devra être débutée à 15 mg par jour avant une augmentation très progressive de 5 puis 10 mg par jour, par paliers de 2-3 jours jusqu’à obtention de l’effet attendu. A partir de la posologie de 120 mg/jour, le médecin prescripteur devra demander un deuxième avis à un collègue expérimenté dans la prise en charge de l’alcoolo-dépendance, psychiatre, addictologue ou tout autre médecin formé à la prescription du baclofène, précise l'ANSM. Si le patient a besoin d’une dose quotidienne de baclofène de plus de 180 mg, un avis collégial au sein d’un CSAPA (Centre de Soins d’Accompagnement et de Prévention en Addictologie) ou d’un service hospitalier spécialisé en addictologie sera requis. Et la posologie maximale de 300 mg/jour ne devra jamais être dépassée. Une fois l’objectif de sevrage atteint, l’ANSM encourage les prescripteurs à diminuer la posologie, chaque patient devant bénéficier de la dose minimale efficace adaptée.

Un dispositif particulier de suivi des données d’efficacité et de sécurité du médicament a été mis sur pied. Le portail électronique https://www.rtubaclofene.org doit permettre de guider patients et prescripteurs dans l’utilisation de ce nouveau traitement de l’alcoolisme et de détecter les signaux de pharmacovigilance.

Depuis 2008, plus de 50 000 patients l'ont utilisé et 7 000 médecins l'ont prescrit en dehors d’un véritable cadre légal.