Une vie sexuelle à part, des besoins spécifiques… mais rarement pris en compte. Les bisexuels sont particulièrement exposés au risque d’infections sexuellement transmissibles (IST) et de VIH, souligne une étude à paraître dans l’American Journal of Preventive Medicine. Mais les services de santé ont bien du mal à appréhender cette population marginale et marginalisée.
Un risque élevé de transmission
Les hommes bisexuels ne représentent que 2 % de la population américaine. Mais ils sont atteints par le VIH et les IST de manière disproportionnée, alerte cette étude menée par les centres américains de contrôle des maladies (CDC). Les chercheurs ont en effet observé que la prévalence du VIH est plus basse chez les bisexuels que les homosexuels… mais le risque d’être infecté est bien plus élevé dans cette population, qui se fait également moins dépister. Ainsi, alors que 2,3 % des hétérosexuels ont été soignés pour une IST au cours de l’année passée, ils sont 12 % chez les gays et 21 % chez les hommes bisexuels.
Selon le Dr William Jeffries, qui a mené l’étude, plusieurs raisons expliquent cette disproportion. Partenaires multiples, échangisme ou encore abus de substances en font partie. Mais les rapports non protégés avec pénétration, y compris oraux, sont plus fréquents chez les bisexuels. Lors des relations avec des hommes, davantage infectés par le VIH aux Etats-Unis, le risque de transmission du virus est donc élevé.
Leur attitude vis-à-vis de la paternité ne doit pas non plus être négligée. Ils évitent le préservatif quand ils savent qu'il n'y a aucun risque de grossesse. Mais des qu'un risque existe ils se protègent pour ne pas avoir d'enfant. « En outre, note le Dr Jeffries, leur désir d’avoir une descendance biologique peut les pousser à avoir des rapports non protégés avec des femmes. A cet égard, le désir de paternité peut indirectement accroître la vulnérabilité de ces hommes à une transmission du VIH ou d’une IST. »
Lutter contre la biphobie
L’étude souligne aussi l’importance de la « biphobie » dont cette population est victime. Les bisexuels se sentant marginalisés, ils ont tendance à moins se rendre chez le médecin et à moins se faire dépister. C’est un des points d’amélioration soulevés par cette étude. Les professionnels de santé doivent être moins hostiles envers les bisexuels qui cherchent à se renseigner sur leur santé sexuelle ou le dépistage d’une IST.
Le Dr Jeffries suggère de lancer des campagnes de publicité pour contrer la biphobie et l’homophobie. Il réclame aussi le développement de programmes « d’éducation sexuelle compréhensive » - qui donne des conseils adaptés à toutes les orientations sexuelles. Pour cela, rien de mieux que l’ouverture d’espaces sociaux qui privilégient la discussion sans tabou et le soutien social, conclut l’étude. « La promotion de la santé sexuelle pour les bisexuels ne doit pas se limiter à la seule prévention des IST et du VIH. Reconnaître que les expériences sociales et sexuelles de bisexuels sont uniques jettera les fondations nécessaires pour s’assurer que ces hommes ont des expériences saines et satisfaisantes », insiste le Dr Jeffries. Des efforts spécifiques et sur mesure sont indispensables pour améliorer la santé sexuelle de cette population vulnérable. »