On les appelle « les fantômes de la République ». Sans doute parce que la France leur refuse un état civil. Pourtant, ils ont, la plupart du temps, un père biologique français et une mère porteuse étrangère. Ils sont environ 2 000 couples français à avoir contourné la loi française pour tenter l’aventure douloureuse et improbable de la gestion pour autrui (GPA) hors de nos frontières. Avec, à la clé, un casse-tête impossible pour faire reconnaître l’enfant sur le sol français.
Jeudi, note Le Monde, comme la plupart de vos journaux, la France a été « condamnée à deux reprises par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), faute d'avoir transcrit à l'état civil français les actes de naissance d'enfants nés légalement à l'étranger par mère porteuse ».
« Cet arrêt reconnaît le droit des enfants nés de GPA à avoir des parents », commente Patrice Spinosi, l’avocat du couple Mennesson dans Libération. Une victoire qui met un terme à 14 ans de bataille judiciaire et qui récompense l’obstination de cette famille.
Figures emblématiques du combat pour la reconnaissance de la GPA, Sylvie et Dominique sont parents de jumelles de 14 ans. Atteinte d’une malformation rare l'empêchant d'entamer une grossesse, Sylvie a dû recourir, avec son mari, à une mère porteuse en Californie. « La France ne nous reconnaissait pas comme parents et c’était le plus difficile à vivre, précise-t-elle dans le quotidien, bien plus sur le plan symbolique que tous les tracas administratifs. »
Si cette décision du CEDH va permettre aux autres familles d’obtenir gain de cause auprès de l’administration française qui les rejetait pour des motifs tels que « soupçon d’adoption illégale » pouvant causer un « trouble à l’ordre public », elle change également le regard sur ces enfants. « La CEDH (…) est partie de l’intérêt des enfants et a considéré que la France, en refusant la reconnaissance de leur filiation et de leur nationalité, portait une atteinte disproportionnée à leur droit à la vie privée, garanti par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme », conclut Me Patrice Spinosi.