« Mon départ s’inscrit dans un projet totalement personnel et bien sûr professionnel. Cela fait 23 ans que je suis au CHU de Reims où j’ai gravi toutes les strates de la carrière médicale.» Dans une interview à l'Union-L'Ardennais, parue ce vendredi, le Dr Eric Kariger annonce qu'il va quitter son poste de chef de l'unité de médecine palliative et de soins de support le 1er septembre pour rejoindre le privé. C’est dans cette unité du centre hospitalier de Reims que le Dr Kariger suivait depuis des années Vincent Lambert, ce patient de 38 ans devenu tétraplégique à la suite d’un accident de moto en 2008 eten état végétatif chronique.
Le 24 juin dernier, un nouvel épisode s’ajoutait à liste déjà longue des décsions médicales et juridiques stautant sur la fin de vie de ce patient. La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) avait demandé en urgence le maintien en vie de Vincent Lambert, contre l'avis rendu le même jour par le Conseil d'Etat.
Lors de son entretien publié aujourd’hui dans le quotidien régional, le Dr Kariger évoque les rebondissements de cette affaire. «Bien sûr, on ne va pas le nier, l’affaire judiciaire que l’on a dû subir à travers la situation de notre patient Vincent Lambert est un élément qui a contribué à ma réflexion et à ma décision. Mais c’est un élément parmi d’autres.» Et le gériatre de préciser que sa demande de disponibilité avait faite dès le mois de mai.
« Il y a un épuisement »
Déjà, dans l’entretien accordé à pourquoidocteur au lendemain de la décision la CEDH, lemédecin ne cachait pas une amertume teintée de lassitude: « Sur le plan déontologique, éthique, et humain, c'est un temps particulièrement douloureux. Il est vécu comme inutilement trop long. Aujourd'hui, il y a quand même un épuisement. Aussi bien du côté de son épouse (NDLR : de Vincent Lambert), de ses proches, comme chez les médecins du CHU de Reims. Cette décision de repousser l'échéance à une date inconnue est la pire situation. »
Sur le sort réservé à son patient, là encore, le Dr Kariger se montrait amer : « pour parler de Vincent Lambert, je pense qu'à l'instant où je vous parle, ses droits les plus élémentaires sont bafoués. Et son droit à ne pas subir une obstination déraisonnable est aussi bafoué ».
Aujourd’hui, le Dr Kariger avoue sans détour que cette histoire le marquera à vie. « De tous les milliers de patients que l’on est amené à soigner dans une vie, sans offense, on ne se souvient pas de tous. De Vincent Lambert… je suis sûr que je m’en souviendrai jusqu'au bout, » concède-t-il l'Union-L'Ardennais.