Le constat du dernier Bulletin épidémiologique hebdomadaire de l'Institut de veille sanitaire est sans appel. La fin de l’année 2013 a vu l’émergence "brutale" du chikungunya dans les départements et collectivités français d’Amérique (DFA). Si, à Saint-Martin et Saint-Barthélemy, l'épidémie marque le pas (baisse et stabilisation du nombre de consultations), son évolution n'est pas comparable en Martinique et en Guadeloupe. Selon ces épidémiologistes, la circulation virale semble avoir débuté sur un mode "beaucoup plus intense" dans ces derniers territoires. Et visiblement, la situation là-bas n'est pas sur le point de s'améliorer.
Une immunité collective insuffisante
En effet, en Martinique et en Guadeloupe, « l’arrivée de la saison des pluies dans les Antilles, de juillet à novembre, constitue un risque d’expansion de l’épidémie », précise le BEH. De plus, « l’incidence cumulée des infections par le chikungunya y est certainement encore trop faible pour constituer une immunité collective suffisante », rajoutent ces épidémiologistes.
Résultat, c'est durant cette période tant redoutée que les épidémies atteignent habituellement leur pic. En revanche, le BEH souligne qu'il est plus difficile de prévoir si, dans ces grandes îles, l’épidémie évoluera ou non comme celle de La Réunion en 2005, d’une ampleur exceptionnelle avec plusieurs centaines de milliers de cas. Cela pour deux raisons : d’une part, nous ne sommes en présence ni du même moustique, ni de la même souche virale, « ce qui peut entraîner une différence dans la compétence du moustique vis-à-vis de la souche virale. »
D’autre part, « des différences dans les facteurs climatiques (notamment avec une amplitude annuelle des températures plus importante à La Réunion) et dans les mesures de contrôle mises en œuvre pourraient également induire une évolution différente de la circulation virale. »
90 000 personnes infectées aux Antilles françaises
Par ailleurs, des rassemblements de population, tels que la Coupe du monde de football en juin 2014 au Brésil, constituent des situations favorables à la diffusion virale et nécessitent des mesures de prévention spécifique. Plus globalement, « l’introduction du chikungunya dans ces pays très peuplés et vis-à-vis duquel la population est totalement naïve représente une menace sanitaire d’envergure et justifie l’alerte et les recommandations lancées récemment », précise l'InVS. Raison pour laquelle, les autorités martiniquaises viennent de publier un livret d’information pour couper court aux rumeurs qui circulent dans les îles touchées par le chikungunya.
Car cette méconnaissance a des conséquences néfastes sur les populations locales. Ainsi, depuis décembre 2013, le chikungunya, ou « la maladie de l'homme courbé », est à l'origine de 407 hospitalisations sur un total de 90 000 personnes infectées aux Antilles françaises. 46 000 en Guadeloupe, près de 3 500 sur l'île de Saint-Martin, 650 à Saint-Barthélémy et plus de 40 000 en Martinique. Soit 10 % de la population touchée dans ces îles françaises des Caraïbes.
Pour rappel, le chikungunya se caractérise par de fortes fièvres, et d 'importantes douleurs articulaires, des courbatures. Si vous ressentez ces symptômes, il y a deux impératifs : prendre du paracétamol (mais pas d'anti-inflammatoire type aspirine) et consulter immédiatement un médecin.