En direct du World Congress of Cardiology (Dubai, 18-21 avril 2012)
Une fiscalité sur les aliments contenant du sel pourrait, chaque année, réduire de 2 à 3% le nombre de décès liés aux maladies cardiovasculaires. Ces données préliminaires sont issues d’une étude américaine présentée au Congrès Mondial de Cardiologie (WCC 2012).
Pilotée par l’université de Harvard, l’étude visait à comparer le rapport entre le coût et l’efficacité de deux interventions : d’une part, la réduction volontaire du sel utilisé par l'industrie agroalimentaire dans la préparation des aliments, et, d’autre part, une taxation du sel. L’intervention était tirée au sort pour être appliquée dans 19 pays en développement, représentant plus de la moitié de la population mondiale.
L’étude a révélé que les deux stratégies permettaient de réduire le nombre de personnes nécessitant un traitement anti-hypertenseur et de diminuer le nombre d’accidents cardiovasculaires : réduction du nombre d'infarctus du myocarde d’environ 1,7% en Chine et 1,5% en Inde. La diminution des accidents vasculaires cérébraux pourrait être respectivement dans ces deux pays de 4,7% et de 4%.
Le sel est abondamment utilisé par l’industrie agro-alimentaire (1), même si on l’ignore le plus souvent, car il s’agit d’un « sel caché ». Cette utilisation extensive s’explique par le fait que le sel est un conservateur très bon marché, en plus d’être un agent de sapidité (additif alimentaire capable d’améliorer la saveur des aliments). La réduction volontaire de l’utilisation de sel par ces industriels se heurte à une profonde inertie. Une taxation permettrait de rendre le recours au sel en tant que conservateur, beaucoup moins rentable, et donc d’accélérer la réduction de son utilisation.
Un apport trop important en sel a des implications majeures pour la santé du cœur et des vaisseaux sanguins. Une relation directe a été établie depuis longtemps entre l'apport quotidien en sel et l'hypertension artérielle (élévation de la pression à l’intérieure des artères). A l’inverse, les études ont révélé que la diminution de l'apport quotidien en sel est directement associée à une baisse de la pression artérielle.
Une pression artérielle élevée, et qui n'est pas traitée, peut augmenter considérablement le risque de développer une maladie cardiovasculaire. Le traitement de l'hypertension artérielle permet d’obtenir une réduction importante du risque d'accident vasculaire cérébral et du risque d'infarctus du myocarde, mais il a un coût économique important. L’hypertension artérielle est donc l'un des principaux facteurs de risque de décès prématuré qui est évitable.
Les résultats de cette étude démontrent donc que les stratégies pour réduire, même de façon modeste, la consommation de sel, et surtout le « sel caché » dans l’alimentation, pourrait conduire à des réductions importantes de la mortalité par maladies cardiovasculaires. En réduisant l’importance de la prise en charge médicale de ces maladies, ceci ce traduirait également par des économies de dépenses de santé.
(1) Les niveaux requis de réduction du sel dans les produits alimentaires ont été fixés à partir de la UK Food Standards Agency. Ces recommandations avaient conduit à une réduction de 9,5% de l'apport net de sel au Royaume-Uni. Une augmentation des taxes de 40% sur les prix du sel pour l'industrie (c’est-à-dire du même niveau que celle généralement appliquée sur le tabac) avait permis une réduction de 6% de la consommation dans des travaux antérieurs.