Quel est le point commun entre un mannequin, une miss américaine, une adolescente anglaise, et Angelina Jolie ? Toutes ont fait parler d’elles au cours des derniers mois, en apportant une visibilité nouvelle à leur maladie. Les actions individuelles sur les réseaux sociaux, tout comme l’engagement des célébrités, redessinent la manière de faire de la prévention sur les maladies. De la photo choc partagée sur Instagram, Facebook ou Twitter, à la tribune d’une star d'Hollywood, la communication sur les symptômes, les traitements et le dépistage, se transforme complètement... et s'adapte à l'Internet 2.0.
L'effet d'Angelina Jolie
Angelina Jolie, qui a évoqué sa mastectomie préventive dans les colonnes du New York Times, est sans doute la meilleure illustration de cette nouvelle prévention via les médias. Grâce à son intervention, un grand nombre de femmes a fait un test génétique, pour savoir si elles étaient porteuses d'une mutation du gène BCR1 ou BCR2, qui augmente de 40 à 80 % le risque de développer un cancer du sein. Pour de nombreux médecins, ces déclarations très médiatiques représentent une véritable opportunité d’éduquer le public à cette question de santé complexe. Pour l'association contre le cancer ARC, « cela a permis à toutes les femmes concernées de d'envisager l'option de la masectomie en leur âme et conscience. » Angelina Jolie a surtout permis de banaliser la maladie, estime le Pr Cyril Tarquinio, professeur de Psychologie clinique et de Santé à l'université de Lorraine.
Ecoutez le Pr Cyril Tarquinio, professeur de psychologie clinique à l'université de Lorraine : « Angelina Jolie a quelque chose de très intéressant. Les Allemands avaient déjà montré la beauté des femmes ayant subi une mastectomie. Cela permet de banaliser la maladie. »
Jeunes, belles mais malades
D’autres femmes, plus ou moins célèbres, ont suivi l'exemple de la star hollywoodienne et se sont servi des réseaux sociaux pour briser de nombreux tabous et clichés sur des maladies peu connues, et parfois stigmatisées. C’est le cas de Miss Idaho 2014, Sierra Sandison, qui a fait le buzz ce mois-ci en défilant en bikini avec sa pompe à insuline. La photo du concours, partagée et vue des centaines de fois sur Instagram, a mis un coup de projecteur sur le diabète de type 1. Désespérée après le diagnostic, elle raconte aujourd’hui que partager sur sa maladie et être soutenue par les internautes l’a aidée à s’accepter. Les déclarations de Bethany Townsend sont très semblables. Cette mannequin britannique, atteinte de la maladie de Crohn, une inflammation du système digestif, a posé lors de ces dernières vacances avec sa poche de colostomie. La photo a récolté plus de 300 000 « like » sur Facebook et a lancé le mouvement #GetYourBellyOut (Montre ton ventre). Ces deux initiatives bénéficient d’une bonne visibilité, parce qu’il s’agit de jolies jeunes femmes, ayant une certaine notoriété. Mais elles ont permis de déstigmatiser le diabète et la maladie de Crohn, et de leur donner une image plus juste, comme l'explique le Pr Tarquinio.
Ecoutez le Pr Cyril Tarquinio : « Ces témoignages permettent ce se faire de meilleures représentations de la maladie. »
Plus qu'un phénomène de mode
Il n'y a pas que les stars qui s'essayent à la prévention 2.0. Ressentant le besoin de parler de leur maladie, parfois avec humour, de montrer qui ils sont vraiment, de nombreux malades trouvent un outil idéal à travers les réseaux sociaux. Rebecca, une étudiante anglaise de 21 ans a ainsi posté un montage sur Youtube, qui montre son évolution au cours des six dernières années. La jeune femme souffre d'un trouble sévère : la trichotillomanie. Les personnes qui en sont atteintes ne peuvent s'empêcher de s'arracher poils et cheveux en période de stress.
Ecoutez le Pr Cyril Tarquinio : « On peut penser que c'est un phénomène de mode, mais ça répond à un besoin. »
Ces initiatives permettent de décloisonner la maladie et de rendre compréhensibles certaines pathologies complexes, dont l'on se fait des représentations erronées. Mais prévenir et informer sur les réseaux sociaux ne remplacera jamais les explications d'un médecin, que l'on soit une star ou non. Pour reprendre l'exemple d'Angelina Jolie, un sondage paru dans Genetics Medecine a montré que trois quarts des sondés ont pris conscience de son passé médical mais pas qu'une mutation du gène BRCA est associée au cancer du sein.