Ce n’était finalement ni un Hobbit ni une nouvelle espèce d’hominidé… mais un homme moderne, atteint de la trisomie 21. L’homme de Florès, dont les ossements ont été découverts en 2004, a laissé espérer la découverte d’une espèce inconnue. Deux études parues ce 4 août dans la revue de l’académie américaine des sciences (PNAS) ont de quoi doucher l’enthousiasme : ce qui était considéré comme « la plus importante découverte dans l’évolution humaine depuis 100 ans » était en fait une simple erreur d’analyse.
Une sorte de Hobbit ?
En 2004, dans la grotte de Liang Bua, située sur l’île de Florès, au large de l’Indonésie, plusieurs restes humains datant d’il y a 15 000 ans sont découverts. La plupart des ossements sont fragmentaires, mais un squelette se distingue, le LB1. Contrairement aux autres, son crâne et ses fémurs sont quasi-intacts. Leur analyse permet de dresser un premier profil pour le moins inhabituel : il aurait mesuré 1,06 mètre et le volume de son crâne n’excédait pas 380 millilitres, soit un tiers de celui de l’homme moderne. Une visualisation en 3D montre aussi une asymétrie du visage. En le comparant aux espèces humaines précédentes, l’Homo erectus et l’Australopithèque, aucune similitude ne ressort. Il n’en faut pas plus : les chercheurs le baptisent Homo floresiensis, l’homme de Florès, c’est-à-dire une nouvelle espèce.
Une microcéphalie modérée
La ré-analyse des données a fait retomber le soufflé avec une certaine brutalité. Ce squelette n’est pas le représentant d’une nouvelle espèce, seulement celui d’un être humain qui a développé une anomalie congénitale. Nous sommes donc bien loin du « Hobbit » fantasmé par la première équipe. Et pour cause : quelques erreurs ont été commises lors de la première série d’analyses. Le crâne mesure en fait 430 millilitres. Certes petit pour un être humain moderne, mais pas inhabituel. « Sur près de 200 syndromes pour lesquels la microcéphalie est un symptôme, plus de la moitié incluent une asymétrie du visage, et plus d’un quart incluent aussi une petite taille », souligne l’étude.
Un homme d'un mètre 26
Car l'extrapolation à partir du fémur pour estimer la taille de l’homme de Florès est également biaisée : elle s’appuie sur une formule dérivée de la population des Pygmées d’Afrique. En réalité, il aurait mesuré 1,26 mètre, ce qui correspond à certaines populations de la région. « La différence est significative, et cette nouvelle apparence tombe dans la catégorie des hommes modernes atteints du syndrome de Down (trisomie 21) vivant dans la même zone géographique », explique Robert Eckhardt, qui a participé aux deux études. « Inhabituel ne signifie pas unique », rappelle-t-il en commentant l’autre étude. « Les caractéristiques décrites à l’origine ne sont pas si rares qu’il ait fallu inventer une nouvelle espèce d’hominidé. Quand nous avons vu les os pour la première fois, un bon nombre d’entre nous a repéré des troubles du développement, mais nous n’avons pas posé de diagnostic spécifique, puisque les os étaient fragmentaires. Avec le temps, plusieurs preuves ont suggéré qu’il s’agit d’une trisomie 21. »