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Optogénétique

Cerveau : effacer les mauvais souvenirs avec la lumière

Par Julian Prial

Grâce à une nouvelle technologie de contrôle du cerveau, les émotions associées à des mauvais souvenirs peuvent être réécrites. 

KOBBEH/SIPA

Vous avez toujours rêvé d'oublier vos mauvais souvenirs, mais vous n'y arrivez pas ? Des chercheurs américains et japonais pourraient bientôt réaliser votre rêve. Selon une étude publiée dans la revue scientifique Nature, les émotions associées à des souvenirs peuvent en effet être réécrites. Une solution qui permettrait d'adoucir des événements douloureux du passé.

Quand la lumière contrôle le cerveau
Ces travaux ont été le fruit d'une collaboration entre des chercheurs de l'institut de recherche japonais Riken et le Massachussetts Institute of Technology (MIT) aux États-Unis. Leur constat s'appuie sur une nouvelle technologie de contrôle du cerveau via la lumière, appelée « optogénétique ». Leurs résultats prouvent que l'interaction entre l'hippocampe, partie du cerveau qui joue un rôle central dans la mémoire, et le complexe amygdalien, censé être une sorte de chambre de stockage des réactions positives et négatives, est plus flexible que ce que l'on pensait jusqu'à présent.
Pour comprendre cela, ces scientifiques ont injecté une protéine d'algue sensible à la lumière à deux groupes de souris mâles. Ils ont ainsi pu suivre la formation d'une inscription en mémoire en temps réel, qu'ils ont réactivée à leur gré grâce à des impulsions lumineuses. Certains rongeurs ont été autorisés à jouer avec des femelles afin de créer un souvenir connoté positivement, tandis que leurs camarades se voyaient au contraire asséner un déplaisant choc électrique.


Agir sur l'hippocampe et pas sur l'amygdale
Ensuite, l'équipe a fait artificiellement revivre ces souvenirs, tout en les soumettant simultanément à l'expérience opposée : les souris agréablement disposées recevaient un choc, tandis que les autres avaient la bonne surprise de rencontrer leurs comparses. Et la nouvelle expérience a pris le dessus sur l'émotion initiale. 
« Nous avons fait un test dans la première cage de laboratoire et la crainte originelle avait disparu », a expliqué auprès de l'Agence France Presse (AFP) Susumu Tonegawa, Prix Nobel de médecine en 1987, et principal auteur de l'étude.
Cependant ce phénomène n'a pu être observé qu'en agissant sur l'hippocampe, sensible au contexte environnant, alors qu'il n'a pas été possible d'influer sur l'amygdale.


Une piste pour traiter les maladies mentales

Les chercheurs, qui avaient déjà publié des travaux sur l'inscription en mémoire de faux souvenirs chez une souris, espèrent que leurs découvertes du changement de valence positive à négative (d'attirance à répulsion) et vice-versa, feront avancer la recherche médicale sur les maladies de type troubles dépressifs ou post-traumatiques, affectant notamment les militaires, ouvrant ainsi des perspectives pour prendre en charge ces pathologies.

Dans un commentaire rapporté par Nature, les chercheurs Tomonori Takeuchi et Richard Morris de l'université d'Edimbourg en Écosse concluent que cette étude jette une lumière nouvelle sur les mécanismes de la mémoire, tout en relevant les limites de l'optogénétique en la matière.
Et « les mécanismes neuronaux et les circuits du cerveau qui autorisent ce changement de registre émotionnel demeurent largement méconnus », rappellent les auteurs de l'étude.