Trop d’antibiotiques sont encore prescrits inutilement. Une méta-analyse, à paraître dans l’édition d’octobre de la revue Pediatrics, conclut que les médecins ont un recours trop large à ces médicaments pour les enfants. Ses auteurs dénoncent notamment le manque de moyens dont dispose la médecine de ville pour distinguer les infections virales et bactériennes.
Une équipe de l’hôpital pour enfants de Seattle (Etat de Washington, Etats-Unis) a passé en revue les études menées entre 2000 et 2011 pour évaluer la prévalence des infections aiguës de la sphère ORL (otites, sinusites, bronchites, pharyngites et infections des voies respiratoires supérieures) chez les patients mineurs. Les chercheurs ont également passé en revue les données disponibles sur les consultations pour les mêmes infections sur la même période, afin d’estimer le taux de prescriptions d’antibiotiques.
La menace de l'antibiorésistance
Sur 10 ans, les infections aiguës des oreilles ou des voies respiratoires étaient bactériennes dans 27 % des cas. Pourtant, les médecins ont prescrit des antibiotiques dans 57 % des cas… soit deux fois plus que nécessaire. Le reste des infections étant d’origine virale, le recours à ces médicaments était pourtant inutile, rappellent les auteurs de l’étude. Ainsi, chaque année, 11,4 millions de prescriptions seraient établies inutilement. Plus inquiétant : cette estimation n’a pas varié d’un iota sur la dernière décennie, malgré les avertissements des autorités sanitaires.
S’ils incitent clairement à prescrire à meilleur escient, les chercheurs reconnaissent la situation difficile des médecins généralistes. Ils ne disposent d’aucun outil pour distinguer une infection virale d’une infection bactérienne, en dehors du StreptoTest, ce qui explique cette sur-prescription massive. Il faut donc, de toute urgence, mettre au point des tests rapides dans ce sens. Car on le sait, un recours trop systématique aux antibiotiques favorise le développement d’une résistance bactérienne. Et l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a lancé l’alerte très officiellement : l’antibiorésistance est une menace devenue bien réelle, et elle pourrait renvoyer la médecine au Moyen-Âge si rien n’est fait.