« L’affaire Titouan » continuera de faire couler beaucoup d’encre. Ce grand prématuré de 900 grammes, né près de quatre mois avant le terme, est décédé au CHU de Poitiers. Ses parents demandaient l’arrêt des soins et dénonçaient une forme d’acharnement thérapeutique.
Pourquoi les médecins ont-ils accédé à leur demande ? Que s’est-il passé pendant ces deux semaines ? De quelle manière les parents ont-ils été impliqués dans le processus de décision ? Eléments de réponse avec des professionnels de santé, confrontés quotidiennement à ces situations.
Réanimation d’attente
Loin d’être insensibles à la douleur des parents et de leur enfant, les médecins du CHU de Poitiers ont suivi une procédure bien définie, inspirée de recommandations nationales, et encadrée par la loi Leonetti sur la fin de vie.
Pendant deux semaines, Titouan était en « réanimation d’attente ». Le délai peut sembler long – une éternité, même, pour ses parents. Et pourtant, on ne peut faire l’économie de ce laps de temps, selon Emmanuel Hirsch, responsable de l'espace éthique de l'AP-HP.
« C’est une épreuve difficilement supportable pour les parents, mais nécessaire. Les investigations scientifiques prennent du temps pour savoir quelles seraient les éventuelles séquelles d’une réanimation qui irait trop loin, mais il faut privilégier l’intérêt supérieur de l'enfant », estime-t-il.
Ecoutez Emmanuel Hirsch, responsable de l'espace éthique de l'AP-HP : « La réanimation d’attente, c'est une démarche à la française ».
Réunions éthiques collégiales
En général, cette réanimation d’attente n’excède pas un mois, mais certains témoignages font état de cinq mois d’attente, un calvaire pour les parents. Au cours de cette période, le nourrisson est placé sous assistance ventilatoire. Les médecins procèdent à des examens réguliers (encéphalogrammes, échographies cérébrales, IRM…). Puis, les équipes se réunissent pour rendre une décision en collégialité.
« Quand on prend en charge un extrême prématuré, on sait dès le départ qu’on risque d’être confronté à des complications, explique Jean-Claude Magny, chef du service de réanimation néonatale à l’hôpital Necker. L’équipe médicale se pose rapidement la question de savoir si l’on est, ou pas, dans l’obstination déraisonnable. Les parents sont toujours consultés ».
Ecouter Jean-Claude Magny, chef du service de réanimation néonatale à l’hôpital Necker : « Il y a des réunions éthiques collégiales qui permettent de prendre ces décisions »