Lorsque, la semaine dernière, l’infirmière française a contracté le virus Ebola au Libéria, 40 heures se sont écoulées entre le lancement de l’alerte et son rapatriement. Finalement, c’est une compagnie américaine qui a transporté la jeune femme. Et pour cause : en France, comme dans le reste de l’Europe, les compagnies d’ambulance aérienne refusent catégoriquement de prendre en charge des patients atteints d’Ebola.
Mais après des mois de négociations, une société française, Medic’Air, une PME spécialisée dans le rapatriement d’urgence, a arraché un accord avec l’une d’entre elles pour envoyer un avion et son équipage en Afrique de l’Ouest en cas de nouvelle alerte.
« Nous sommes prêts à intervenir depuis le début de l’épidémie »
L’avion affrété est un biréacteur Citation, intégralement équipé pour cette mission. Très rapide, il ne peut en revanche qu’effectuer des distances moyennes et devra donc faire une escale de 45 minutes dans un lieu défini entre l’Afrique et l’Europe, mais gardé secret pour le moment. La société Médic’Air, quant à elle, fournira le personnel soignant. Elle pourra rapatrier des patients français, mais aussi étrangers.
« Nous avons formé nos médecins et nos infirmiers pour prendre en charge ce type spécifique de patients, explique Hervé Raffin, urgentiste et directeur général de Medic’Air. Nos équipements ont également été renforcés. Nous sommes prêts à intervenir depuis le début de l’épidémie. » Il ne leur manquait plus que l’avion et le pilote, fournis par des prestataires… qui lui ont tourné le dos les uns après les autres.
« Nous avons d’abord demandé aux compagnies avec lesquelles nous travaillons au Bourget et en province, qui ont décliné. Puis nous avons cherché en Europe, sans succès. Il existe un dogme dans les pays germaniques et anglo-saxons : on ne transporte aucun malade contagieux. »
Ecoutez Hervé Raffin, urgentiste et directeur général de Medic’Air : « Le pilote, de base, est phobique du microbe »
« Un risque proche de zéro »
Selon Hervé Raffin, deux arguments ont convaincu la compagnie d’avion-ambulance, dont le nom n’a pas été divulgué, d’accepter la mission. D’abord, le cas de la Française contaminée a éveillé les consciences. « Les gens commencent à se sentir concernés. On ne peut pas laisser nos collègues médecins et infirmiers travailler là-bas sans avoir une solution pour aller les chercher ».
Mais c’est aussi l’expertise de Medic’Air qui aurait fait changer d’avis la compagnie aérienne et ses pilotes, d’abord très réticents. En 2011, la société a rapatrié avec succès un patient atteint du virus Lasa, une fièvre hémorragique proche d’Ebola. Ses équipements, très performants, ont aussi fait la différence. La PME dispose de caissons d’isolement dont la technologie très développée permet de résister à la pression de l’altitude. « Nous pourrons intervenir avec un risque proche de zéro », affirme Hervé Raffin.
Ecoutez Hervé Raffin : « Nous avons récupéré la technologie Tchernobyl sur les bulles d’isolement pour les utiliser sur les malades contagieux ».