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Les spécialistes inquiets

Les diabétiques mal traités

Par Melanie Gomez

Alors que les experts américains et européens préconisent la personnalisation des soins pour les diabétiques, la France propose toujours des traitements standard. Des spécialistes s'insurgent.

Ils sont tous les deux diabétiques de type 2 depuis plusieurs années et vivent dans le Nord de la France. ils prennent les mêmes traitements et essaient de suivre les mêmes conseils nutritionnels. Pourtant, l’une vit dans la précarité avec ses enfants qu’elle élève seule, et l’autre est cadre supérieur et vit en couple. Cette simple différence de statut socio-économique et les conséquences évidentes qu’elles peuvent avoir sur l’apparition ou l’aggravation d’un diabète, auraient du faire en sorte que ces deux personnes soient prises en charge de manière spécifique. D’autant que plusieurs études ont montré que chez les diabétiques issus de milieux précaires, il y a plus de complications, comme des problèmes ophtalmologiques ou podologiques. Sans oublier, une inégalité évidente d’accès aux soins.

Pr Claire Mounier-Vehier, vice-présidente de la Fédération française de cardiologie : « La femme diabétique et précaire qui fume et mange mal est plus à risque qu’un homme dans la même situation. A 50 ans, elle risque un infarctus ou un AVC. 



Ill n’y a donc pas un mais des centaines de profils de diabétiques. Mais en France actuellement, la prise en charge proposée aux patients n’est pas adaptée aux situations individuelles. Que l’on soit jeune ou plus âgé, mince ou en surpoids, que l’on souffre uniquement d’un diabète ou qu’il soit associé à d’autres maladies, il est rare que l’on vous propose un traitement à la carte. A l'occasion de  la 1ère journée de prévention du risque cardiométabolique qui vient de se tenir sous le patronnage de l’Académie de Médecine, les spécialistes ont tiré la sonnette d'alarme. 
La France est en retard. Dans le monde, l’approche des maladies chroniques a pris un tournant décisif fondé sur une prise en charge individualisée. Les dernières recommandations officielles des  experts américains et européens du diabète en témoignent : elles préconisent des soins centrés sur le patient et plus uniquement sur de grandes règles qui seraient suivies à la lettre par les médecins.

Rien de tout cela dans l'Hexagone. D’ailleurs, lorsque l’on interroge les généralistes français sur leurs pratiques en matière de diabète, c’est le même constat. Une enquête (1) récente réalisée sur internet révèle que même si les recommandations actuelles françaises sont acceptées par 80% d’entre eux, dans 63% des cas, elles sont mal adaptées à la réalité pratique. C’est surtout le cas lorsque les patients sont non seulement diabétiques, mais également et de plus en plus souvent, obèses et hypertendus en même temps.
Dans ce cas de figure répandu, la personnalisation du traitement paraît être une nécessité. Le médecin devrait prendre en charge le diabète de son patient, tout en tenant compte de ses autres maladies et surtout des autres médicaments. Mais ce n’est pas toujours le cas.  

Pr Claude Jaffiol, membre de l’Académie nationale de médecine : « En France, on doit changer de politique sur les maladies chroniques, et on fera finalement des économies de santé.



La Haute auutorité de santé (HAS), qui édcite des recommandations médicales,  a récemment préconisé aux médecins d'établir un « parcours personnalisé des maladies chroniques ». Des  guides spécifiques ont été mis à leur dispostion pour les aider dans e cette nouvelle approche. Pour le moment, le diabète ne figure pas dans la liste des maladies prioritaires. Une véritable surprise pour les spécialistes présents à cette 1ère journée de prévention du risque cardiométabolique, alors que cette maladie ne cesse de progresser. Une personne sur 5 dans le monde est concernée, soit 260 millions de personnes. 

(1) Enquête proposée par le Pr Jacques Bringer, chef de service des maladies endocriniennes à l’hôpital Lapeyronnie à Montpellier et réalisée en ligne sur le site du Quotidien du Médecin.