Le procès strasbourgeois des deux pharmaciens dans l’affaire de la maladie de Lyme démarré il y a 2 ans, touche à sa fin. Ce jeudi, la sentence est tombée : les deux prévenus sont condamnés à deux ans de prison avec sursis.
Accusation d’escroquerie à l’Assurance maladie
Le tribunal correctionnel a par ailleurs condamné la première prévenue Viviane Schaller, docteur en pharmacie et ancienne gérante d’un laboratoire d’analyses biologiques à Strasbourg, à rembourser la somme de 280 000 euros à la Caisse primaire d’assurance maladie pour « escroquerie ». Cette dernière était accusée d’avoir falsifié les résultats des tests officiels pour pratiquer d’autres analyses, qu’elle se faisait rembourser par la sécurité sociale. Coût de l’opération : plus de 200 000 euros. Le pharmacien Bernard Christophe doit quant à lui verser la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts à l’ordre des pharmaciens, pour la fabrication et la commercialisation sans l’aval des autorités sanitaires du « Tic Tox », un traitement alternatif à base d’huiles essentielles contre la maladie de Lyme.
Les carences du monde médical
Au-delà du fait divers, ce procès fait ressortir les carences du monde médical vis-à-vis d’une pathologie peu connue. La maladie de Lyme est transmise par la tique, présente dans nos forêts. Elle se manifeste d’abord par un érythème cutané, et en l’absence de traitement, elle peut provoquer des problèmes articulaires, cutanés, cardiaques et neurologiques. Son incidence serait d’environ 43 cas pour 100 000 habitants, avec des disparités au niveau régional.
Ainsi, l’Alsace et la Meuse présentent les taux les plus élevés. Mais pour le Pr Christian Perronne, chef du service des maladies infectieuses à l’hôpital Raymond-Poincaré à Garches et membre du Haut conseil de la santé publique, entendu au tribunal de Strasbourg, il y a en France une sous-estimation dramatique de la maladie. « Les tests sérologiques ont été étalonnés pour qu’il n’y ait jamais plus de 5 % de résultats positifs, et ce dogme n’a jamais été remis en cause depuis 30 ans », a-t-il affirmé. Il décrit une sorte d’omerta dans le monde médical, avec des travaux sur cette maladie qui ont bien du mal à être publiés.
C’est dans ce contexte que Viviane Schaller a falsifié les résultats du test officiel, car le protocole prévoit qu’un second test ne doit être pratiqué qu’après un résultat positif ou équivoque du premier. Quant au pharmacien, a-t-il profité de la situation, sachant que les traitements antibiotiques de la maladie de Lyme ne sont pas toujours efficaces en raison des résistances ? En tout cas, les patients se sont succédés à la barre pour témoigner de leurs souffrances. Soutenus par de nombreux malades atteints de la maladie de Lyme au cours de leur procès, les deux inculpés ont décidé de faire appel.