En direct de l'American Diabetes Association (Philadelphie, du 8 au 11 juin 2012)
Une étude pilote sur plusieurs malades souffrant d’un diabète de type 1 et utilisant un « pancréas artificiel » en dehors de l’hôpital, a été présentée au congrès de l’ADA. Il s’agit d’une première mondiale qui a impliqué plusieurs équipes de recherche aux Etats-Unis, en Europe et en France, avec le service du Pr Eric Renard, au CHU de Montpellier.
Le diabète de type 1 est une maladie qui résulte de l’arrêt complet de la sécrétion de l’insuline par le pancréas. L’insuline est l’hormone qui sert à faire pénétrer le sucre, présent dans le sang, à l’intérieur des cellules. Le sucre est indispensable au bon fonctionnement des cellules. Pour suppléer le manque d’insuline sécrétée par le pancréas dans le diabète, la recherche a inventé il y a 90 ans l’insuline. D’abord extraite de pancréas de porc, l’insuline est désormais synthétisée et elle est administrée sous forme de piqûres.
Le taux de sucre (ou glycémie) est normalement très finement régulé par le pancréas au cours de la journée. La glycémie, si elle n’est pas régulée par l’insuline, est susceptible de beaucoup varier sur les 24 heures car l’utilisation de sucre augmente au cours d’un effort, et il a donc tendance à baisser dans le sang. A l’inverse, au cours et après un repas, le sucre va monter très fortement s’il n’y a pas assez d’insuline. Un diabétique a donc besoin d’une injection d’insuline sous forme retard pour couvrir ses besoins sur les 24 heures et d’une injection lors de chaque repas pour gérer l’afflux brutal dans le sang du sucre contenu dans l’alimentation.
Depuis quelques années, les diabétiques de type 1 peuvent disposer de pompes qui apportent régulièrement une insuline pendant toute la journée, mais que le diabétique peut « accélérer » au moment des repas. L’enjeu du « pancréas artificiel » est d’associer à cette pompe un capteur pour mesurer en continu le taux de sucre dans le sang et d’asservir la pompe à insuline à un logiciel qui prend en compte le taux de sucre et calcule les besoins en insuline. C’est ce que les diabétologues appellent une « boucle fermée ».
La difficulté est cependant que le logiciel s’adapte correctement au taux de sucre mesuré par le capteur alors que celui-ci est généralement posé sur la peau et ne mesure donc pas la glycémie réelle, c’est à dire le taux de sucre dans le sang. L’autre difficulté est que la pompe n’apporte pas trop d’insuline, en particulier pendant que le malade dort, car cela provoquerait une « hypoglycémie », c’est-à-dire une chute brutale du taux de sucre dans le sang, avec un risque majeur de coma et de décès. Tous les travaux des chercheurs consistent donc à développer des capteurs plus exacts et des logiciels de gestion de la pompe plus sûrs.
Dans l’étude présentée à l’ADA, les chercheurs se sont sentis suffisamment sûrs de leur « boucle fermée » pour autoriser quelques malades à sortir de l’hôpital pendant 18 heures. Ils les ont laissé aller dîner dans un restaurant, dormir à l’hôtel, y prendre un petit-déjeuner et aller se promener. L’ordinateur chargé de gérer la pompe était un « smartphone » et ce téléphone transmettait en permanence des données à des médecins de garde à l’hôpital. Ceux-ci auraient donc pu intervenir immédiatement en cas de problème, mais cela n’a pas été nécessaire.
Il s’agit donc d’un grand progrès, mais les chercheurs soulignent que si la « boucle fermée » va améliorer la vie et le traitement des diabétiques de type 1. Ce ne sera cependant pas un vrai « pancréas artificiel ». Ce sera plutôt comme le pilote automatique d’un avion : il gérera la perfusion d’insuline en conditions normales, mais dans des situations particulières, le malade devra être capable de prendre la main et de gérer lui-même ses apports en insuline. L’éducation du diabétique de type 1 restera donc essentielle.