« Les indétectés », le mot claque à la Une de Libération comme un défi à l’occasion de la journée mondiale de lutte contre le sida. Si la prise en charge des malades est un succès incontestable, la prévention et le dépistage restent deux échecs patents dans cette guerre contre la maladie. 7 000 à 8 000 nouvelles contaminations, tous les ans, l’épidémie reste active. Mais un autre chiffre fait bondir Eric Favereau : 30 000 séropositifs ignorent leur statut, dont 30 % le découvrent alors qu’ils sont déjà au stade du sida.
Et le journaliste de rappeler l’échec des politiques menées par le passé pour encourager le dépistage. Celle de Roselyne Bachelot en 2011 qui recommandait une stratégie de dépistage appliquée à toute la population. Scepticisme de la part des généralistes et, trois ans plus tard, aucun progrès. « C’est un défi que l’on n’arrive pas à relever. Ce n’est pas qu’il n’y ait pas assez de tests réalisés en France, mais les tests qui sont faits sont souvent inutiles, en tout cas ils n’arrivent pas à toucher les personnes qui passent à travers », explique au quotidien le Pr Gilles Pialoux, chef du service des maladies infectieuses à l’hôpital Tenon (Paris).
Pour Bruno Spire, président d’Aides, « il faut sortir le dépistage des mains du médecin ». L’association a mis en place, avec l’Assurance maladie et des comités locaux, des tests rapides d’orientation diagnostique (TROD). Après un entretien avec un bénévole formé, toute personne peut, après une simple piqûre sur le doigt, avoir un résultat en trente minutes. Ce programme, qui a permis de réaliser 50 000 tests, donne de très bons résultats. Le taux de découverte de la séropositivité est 3,5 fois supérieur à la moyenne générale.
Aller au-devant des populations, cibler le dépistage en fonction des populations et des conduites à risque, mobiliser le personnel paramédical, la formule semble efficace. En témoigne l’initiative prise par certains services d’urgence en Ile-de-France. Dans un premier temps, relate le journal, 27 services d’urgence ont été mobilisés pour proposer des TROD pendant six semaines. Beaucoup d’énergie dépensée et des résultats mitigés en terme d’efficacité.
Mais en resserrant l'offre autour de huit sites, en confiant ce dépistage à des infirmières et en l’organisant autour de questionnaires, le dispositif s’avère efficace.
Alors, résume Jean-François Delfraissy, directeur de l’Agence nationale de recherches contre le sida, dans les colonnes de Libération, « la prévention doit être multiforme, et surtout, elle doit être audacieuse ». « On ne peut plus continuer à regarder l’épidémie se poursuivre », poursuit le directeur de Aides.